Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad est juif de naissance, selon un article très contesté, publié dans le quotidien britannique Telegraph dimanche dernier. La photocopie de papiers d'identité d'Ahmadinejad montre que sa famille a changé de patronyme: pendant l'enfance du dictateur, ils s'appellaient Sabourjian, nom que le Telegraph considère comme d'origine juive. Dans le cas peu probable où ses parents aient été juifs, Ahmadinejad aurait-il le droit à la citoyenneté israélienne, sous la loi du retour qui régit la citoyenneté en Israël?
Non. La loi du retour autorise le ministre israélien de l'Intérieur à refuser la citoyenneté à des candidats qui pourtant remplissent tous les critères, s'ils sont «impliqués dans une activité dirigée contre le peuple juif», ou sont «susceptibles de mettre en danger la santé publique ou la sécurité de l'Etat». Ahmadinejad, connu pour avoir qualifié Israël de «cadavre puant», et qui a, à plusieurs reprises, appelé à sa destruction, serait déclaré inéligible à la citoyenneté.
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Même si Ahmadinejad ne s'opposait pas à l'existence de l'Etat, sa candidature pour faire son aliyah (terme hébreu pour l'immigration juive en Israël) pourrait rencontrer quelques obstacles. En faisant une lecture au premier degré de la loi-qui étend l'éligibilité aux personnes ayant un conjoint, un parent ou un grand-parent juif- on pourrait penser qu'Ahmadinjad aurait les caractéristiques requises, alors que les candidats qui pratiquent ouvertement une autre religion voient en général leur demande rejetée. Les athées et les agnostiques sont en revanche totalement casher.
La loi du retour originelle (de 1950) fut promulguée seulement deux ans après la création d'Israel, offrant à tout «Juif ayant exprimé son désir de s'installer en Israël» de faire son aliyah. La loi ne précisait pas si les candidats devaient être des Juifs pratiquants, ou s'il était suffisant d'avoir une mère juive- condition orthodoxe pour être considéré comme juif dans la doctrine traditionnelle. En 1962, un moine catholique, ancien juif converti pendant la deuxième Guerre Mondiale, tenta de profiter des avantages du flou juridique. La Cour Suprême israélienne légiféra contre Frère Daniel, alors même qu'il avait sauvé de nombreux Juifs de l'Holocauste. La Knesset intégra cette décision de justice dans la loi de 1970, empêchant ainsi les individus s'étant «convertis volontairement» de faire leur aliyah. (En vertu de cette clause, les«Jews for Jesus» ou «Juifs pour Jésus» se sont vus refuser le droit de retour.)
Le ministre de l'Intérieur a largement ignoré l'usage, par la loi, du mot «volontairement». Plus tôt dans l'année, Romuald Jakub Weksler-Waszkinel, dont la mère juive polonaise l'avait laissé aux soins d'une famille catholique avant de mourir pendant l'Holocauste, fit les gros titres en Israël. Ignorant ses racines juives, - et du coup n'ayant jamais fait une conversion volontaire - Weksler-Waszkinel devint prêtre catholique dans sa jeunesse, mais demanda la citoyenneté israélienne quand il apprit l'histoire de sa mère. Le ministre de l'Intérieur, qui dispose d'un comité qui statue sur les cas difficiles, lui offrit un visa de deux ans et non la citoyenneté. Le père Romuald décida d'accepter le statut temporaire plutôt que d'argumenter devant les tribunaux pour prouver que sa conversion était involontaire.
Si Ahmadinejad voulait vraiment tenter sa chance pour obtenir la citoyenneté israélienne, il aurait à présenter des documents prouvant le judaïsme de ses ancêtres. Tout document original est accepté, y compris une lettre provenant d'un rabbin ou la preuve de l'enterrement de ses ancêtres dans un cimetière juif. S'il ne peut fournir de preuve, l'Agence juive pour Israël peut consulter sa base de données fournissant les arbres généalogiques des juifs de la diaspora connus de l'Etat d'Israël, et ainsi essayer de trouver des liens.
Brian Palmer