Je vais vous décrire le déroulement de la course des serveurs ou garçons de café qui se passait dans les années 50, parrainée par Ricard et Muraz.
Les participants étaient 40 à 50, un nombre impressionnant ! Tous, des jeunes hommes qui servaient le petit déjeuner, déjeuner ou serveurs du bar. C’était un tri « physique » et ceux-là, avaient les jambes. Le trieur principal était le professionnel Mr Paul Gautier, très connu dans la restauration et l’hôtellerie.
Au départ de la course, ils sont équipés : d’un liteau, 3 verres, un pot d’eau, une bouteille Ricard, un ouvre bouteille spécial, une boite d’allumettes.
Le départ se donnait à Talborjt devant le Bar Au Coq d’Or qui se trouvait en face de la gare routière et à 20 m du fameux poste de police. Les concurrents passaient devant le cinéma Rex, traversaient la place du Pacha, puis celle de Talborjt. A l’hôtel de la baie, c’est le premier contrôle qui consistait à craquer une allumette et donner à fumer à un client. La boite d’allumettes était au préalable mise dans la main qui portait le plateau et 6 bûchettes étaient disposées à l’extérieur de la boite .Une gymnastique impitoyable, il faut le dire. Là, les serveurs devraient prendre un ticket de contrôle n° 1.
La seconde étape consiste à rejoindre la brasserie du Souss qui était à l’immeuble la SATAS .Il faut passer par l’hôtel Gautier et descendre par les centaines d’escaliers qui frôlent l’hôtel Mauritania .Un véritable exercice d’équilibre et attention aux chutes . Plusieurs ont été éliminés justement dans cette très dure étape.
Un 2ème contrôle les attendait à la brasserie du Souss. Il consistait à servir 3 clients avec du Ricard panaché avec une dose d’eau .Il ne faudrait pas oublier de prendre le ticket de contrôle n° 2.
La 3ème étape consistait à rejoindre l’hôtel Marhaba pour éventuel contrôle. Là, une table poussiéreuse attendait nos courageux garçons au bar du Rond Point. Il faut essuyer la table et repartir sur le Bar Tout Va Bien du boulevard Lucien St en passant par l’avenue chic de Nicolas Paquet. Attention, il ne faut pas oublier le ticket de contrôle n° 3.
Au Tout Va Bien, 3 clients donnaient la commande du repas à consommer à l’arrivée au Bar du Marché où notre amie Colette Geiger travaillait avec sa collègue Martine. Les commandes sont prises mentalement et il faut se rappeler de chacun. Un ticket de contrôle n° 4 à récupérer.
Les braves serveurs arrivaient… voûtés ! Le bras porteur du plateau verrouillé, un massage était nécessaire pour remettre tout en ordre.
Partout où ils passaient, on les applaudissait. Des primes bénévoles étaient distribuées généreusement le long du parcours.
Imaginer le sens de l’équilibre car la bouteille du Ricard et le pot d’eau sont toujours là avec les 3 verres. Un grand Bravo à ces « sportifs » serveurs.
J’avais suivi ces courses depuis 1954. J’avais prié, tout jeune, pour que mes favoris ne chutaient pas, ne cassaient rien, que leurs jambes ne cédaient pas aux crampes et réussissaient à franchir l’arrivée au Bar du marché à la Ville Nouvelle. On vivait une journée suspense et enthousiaste.
Pour justement rendre hommage à ces gens pour ces souvenirs indélébiles, on a fait des recherches mon ami Yazza Jafri et moi sur ces hommes encore en vie, pour discuter avec eux et les écouter raconter leurs prouesses, leurs anecdotes.
Les primes qu’on leur donnait n’étaient pas négligeables.
Pour le premier : 1 mouton + 1000 Dh .Le deuxième, 1 mouton + 750 Dh. le troisième, 1 mouton et 250 dh. Pour tous les concurrents, 1 mouton, 1 habit complet y compris souliers, papillon de serveurs et 100 dh
Pour choisir son mouton cela se passait d’une manière très équitable et amusante. On mettait le bandeau sur les yeux et à votre chance d’attraper dans une écurie aménagée prés du Syndicat d’Initiative, face au Square Briand, le mouton gras… mérité.
Je voudrais aussi tirer chapeau à ces organisateurs, à ces créateurs d’ambiance d’antan dans cette ville d’Agadir. Lahsen Roussafi
http://www.agadir1960.com/forum/viewtopic.php?f=3&t=493