MAROC PAYS QUI M'A VU NAITRE PAR SOLY ANIDJAR
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MAROC PAYS QUI M'A VU NAITRE PAR SOLY ANIDJAR

HISTOIRE DES JUIFS DU MAROC-CASABLANCA-RABAT-MAZAGAN-MOGADOR-AGADIR-FES-MEKNES-MARRAKECH-LARACHE-ALCAZARQUIVIR-KENITRA-TETOUAN-TANGER-ARCILA-IFRANE-OUARZAZAT-BENI MELLAL-OUEZANE
 
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 JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA

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MessageSujet: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:08

JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA


Dernière édition par Soly Anidjar le Ven 9 Jan 2009 - 6:41, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:10

Je me présente,
Abdelkader N’dali, né en 1949 à Kenitra au moment ou il était sous protectorat français. Cette ville ou j’ai été élevé et ou j’ai longtemps vécu a été dirigée par un certain maréchal Lyautey, ce qui lui a valu de s’appeler autrefois Port-Liautey. Je suis le fils d’un tirailleur de 39-45 qui a fait douze ans d’armée française. Dedans il faut compter cinq ans de guerre dont deux en prison chez les nazis. Son nom, Mohamed, fils de Kassem. Si je ne porte pas le même nom, c’est qu’avant il n y avait pas de nom de famille au Maroc.

Je me rappelle que mon père et moi quand j’étais adolescent, on se mettait parfois devant la porte et qu’il lui arrivait dans ces moments là de me raconter ses années de guerre. C’est comme cela qu’il m’a raconté son évasion en Allemagne. Alors qu’il était en camps de prisonnier, un jour il a trouvé le moyen de partir en mangeant du charbon. Du Coup on l’a transféré à l’hôpital d’ou il a pu s’enfuir et rejoindre.
Sur ses papiers d’anciens combattant, c’était bien marqué : « prisonnier juin 40, évadé 42 ».
Mais ses états de service militaire ne s’arrête pas là, parce qu’après s’être évadé, il a choisi de rejoindre le régiment et qu’il a ainsi fait toute la guerre qu’il a finie comme caporal-chef.
Quand la guerre s’est terminée, mon père est revenu au Maroc ou ce passé a été enterré. Histoire classée.Il a fait 5 ans de guerre dont deux ans en prison et trois ans de guerre. Ca c'est des trucs qui arrivent sous la colonisation. Mais ce qu'il me fait mal moi, c'est qu'il touchait 10 sacs pour sa retraite(100 dirhams) et 300 dirhams par trimestre pour son grade de caporal, en valeur de rien du tout.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:12

JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Baraqu11

Tirailleurs algériens, marocains et sénégalais

Ici en France, les gens fêtent la fin de la guerre mais pas là-bas.
Quand mon père revient chez lui au bled, il ne voit plus personne et il ne va pas toucher de prime comme les anciens combattants français. Son seul souvenir sera une petite retraite misérable. Il n’existe plus pour l’état français. Les politiciens ont rapidement oubliés. Par contre mon père me disait qu’il était sûr que ceux avec qui il s’était battu côte à côte, ses anciens compagnons d’arme, s’en souvenaient.
Parfois également, il chantait des chansons de la guerre. Je ne saurais pas les reprendre mais je me souviens de ce qu’elles disaient. Il y’en avait une c’était : « Tirailleurs sénégalais, tirailleurs marocains en avant, tirailleurs algériens à l’abri !»
Après il s'arrêtait. En général il ne chantait pas toute la chanson, juste quelques couplets. Mon père est maintenant décédé mais sa vie me revient toujours en mémoire.
Pendant que mon père servait l’armée française sous le drapeaux bleu, blanc rouge, ma mère, Fatma, fille de Jelloum, gardait mes cinq frères nés avant moi.
Ensuite je suis arrivé et c’est cette histoire que je compte vous raconter maintenant.
KENITRA



Avant de raconter mon enfance, je vais planter le décor et parler de Kenitra, ma petite ville natale, située au bord de la rivière Sebou, entourée par une grande forêt de chênes qui s’étend sur quarante kilomètres jusqu’à la pointe des terres, face à l’océan Atlantique

Kenitra, que j’ai connu partagé en deux : quartier pauvre pour les marocains et quartiers riches pour les français et les américains.
Ces derniers, je me souviens bien que je n’avais pas le droit d’y aller et que si je les ais connus, c’est parce que j y allais en cachette. Tout ca par la faute du maréchal Lyautey ; tout remonte à lui alors on ne peux pas comprendre Kenitra sans faire un peu d’histoire.

Au XIXè siècle le maréchal Lyautey rentre au Maroc, placé sous son protectorat.
Il est malin, il voit bien que cette région, celle du Gharb, est riche et il va décider de s'y installer .
En effet c’est une terre qui donne des oranges, toutes sortes de fruits, une terre très accueillante.
A l’heure actuelle on y trouve ainsi 70 000 m² d’orangers, plusieurs hectares de tomates et de pastèques, des betteraves sucrières (c’est là qu’on produit le sucre du Maroc). Dans cette région du Gharb, on trouve même du pétrole à Sidi Kacem, petit village devenu depuis Préfecture. Le maréchal Lyautey qui a bien vu l’intérêt d’y établir sa résidence va en tirer bénéfice.Tout en recevant une paye royale, il s ‘est retrouvé avec le Maroc à sa disposition comme un Malek Sultan (roi sultan).
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:16


Il n’est pas resté inactif, il a mis sa marque partout, il a construit un port devenu le deuxième au Maroc après Casa port, celui de Casablanca. Il revoit toute la ville. Dans le temps au XIXème siècle les habitants vivaient dans des cabanes en ferraille, des baraque pires que des bidons villes, tout cela va être détruit. Lyautey utilise une main d’œuvre marocaine qu’il pouvait utiliser comme bon lui semblait. Pour couronner le tout il a appelé la ville Port Lyautey et dans le même temps une ville qui était partagée de telle manière que les français puissent vivre entre eux sans être dérangés par les habitants du pays.

La ville connaîtra encore un autre bouleversement en 1956 quand les américains vont installer une immense base qui va s’étendre sur les 5 kilmétres le long de la rivière jusqu’à l’atlantique . Avec eux ils ont amenés les discothèques et ils ont crée une ambiance, leur ambiance, à laquelle on ne pouvait échapper. La plupart des vingt discothèques qu’il y avait quand j’étais jeune datait de cette époque. Le Maroc est un pays ou il y a partout de l’ambiance. En disant cela je pense en particulier à Tétouan dans le nord avec son rythme espagnol ou à Casablanca bien sur, au dessus du lot. «Cinq étoile » comme on dit, avec la place de France, la place de Verdun, mais il est claire que Kenitra est la ville ou il y a autant de discothèques. Ce qu’il ne faut pas manquer c’est la ville avec son éclairage vert rouge jaune, quand Kenitra ressemble a Chicago.
La vie collective ordinaire a Kenitra tourne autour des cafés ou l’alcool n’est pas autorisé . C’est là que les gens se retrouvent généralement. D’autres vont également au stade et la nuit tout le monde se retrouve dans les vingt discothèques qui existaient dans les années 60. La consommation dans le temps était a 5 dirhams.
C’est bien évidement les vendredis ou tout les pratiquants vont dans les mosquées(chambres de Dieu). Pour prier salat joumo’a.

Que rajouter d’autre sinon qu’il faut avoir conscience qu’à Kenitra il fait toujours beau au mois de mars. J’en ai beaucoup profité et je me souviens, quand j’etais très jeune, j’aimais bien partir a la plage pour pêcher et se baigner. La plage s’appelait Media c’est un petit village à la française. Au bord de la plage ne sont restés que les noms des casinos et les rex-bars, les zanzi-bars. Il est situé a 11 KM de la ville. A l’époque on avait pas beaucoup d’argent, j’y allais la plupart des fois à pied et le soir pour entrer c’est pas trop difficile : en stop !

Il est temps maintenant que tout le monde situe Kenitra, que je parle de mon enfance.

ENFANCE
Tout passe très vite jusqu'à ma rentrée a 7 ans en 1956. Avant, je ne sort pas beaucoup de la maison et je ne vois pas beaucoup de chose a raconter sinon que je passais mon temps a jouer.
Ce n’est qu’a partir de 1955 que j’ai commencé a sortir. J’allais en forêt, a la plage, et puis des fois, dans la quartier chic malgré l’interdiction. J’insiste la dessus parce que j’ai ouvert les yeux sur le monde et il y avait devant moi les français et les américains et que ca m’a fait comprendre beaucoup de choses. C’etait une autre époque. A la maison on avait pas de télévision. Et en même temps on n’avait pas trop le temps non plus, ni le droit de s’amuser devant les parents parce qu’il fallait suivre la coutume et quand je dis ça je ne parle pas seulement de la prière mais aussi de la discipline. Ce n’était d’ailleurs pas qu’à la maison mais aussi dans le village ou la discipline était une grande prière que nous les jeunes, devions réciter tous les jours aux Hannas(grand mère).
Avec mes frères chez nous on jouait a des jeux simples : aux billes aux dames, et a la charrette.
C’est un jouet qu’on fabriquait nous même et qui ressemblait a une sorte de voiture faite avec les boites de bière vide. Ensuite on les poussait avec des bâtons pour faire des courses qu’on organisait entre nous.
En 1956 il a fallu que je rentre a l’école. J’avais 7 ans à peine. J’ai fait une évasion de la maison avec un groupe de jeunes du petit quartier, on avait tous le même age, le plus vieux ne dépassait pas 10 ans. On est partis sans avertir les parents. On a été à pied à la plage . Le soir on est revenu en faisant le même trajet. Mes parents ont sus mais ils ne m’ont rien dit.
Pour moi, la chose qui était dur, c’était l’école. Je n’aimais pas : Ils nous tapaient beaucoup pour la moindre erreur. Je me souviens des coups de règle en ferraille. On avait dans le temps moitié moitié : instituteurs français et arabes, ils étaient pareils les uns, les autres. C’était facile de redoubler. Il m’a fallu 12 ans pour obtenir un niveau de 5ème, mais comme je l’ai déjà dis j’ai ouvert les yeux sur la vie, j’ai vu les français et les américains. Alors, la culture…, je savais ce qu’il fallait savoir. Quand nous étions en vacance ou de repos nous passions notre temps dehors en train de jouer, surtout les garçons et on rentrait tous manger le midi avant de ressortir jusqu’au soir pour recommencer a s’amuser entre nous et là, le soir, je pouvait réviser.
Mes jours préférés de la semaine c’était le vendredi et le dimanche. Et ce jour là je me forçais a me réveiller de bonne heure pour pouvoir me faufiler dans les quartiers chics, français et américains, toujours (interdits). La je m’arrangeais pour passer devant les discothèques et les bars et je ramassait des pièces de 25 cents, 10 et 5 cents. Parfois ça m’arrive de tomber sur des dollars perdus. C’est surtout a partir de 10 ans que j’ai commencé à faire ça. Avec quelques pièces perdues ou des dollars je me débrouille bien pour arriver à avoir l’argent de poche pour acheter dehors des bonbons, et pour payer un ticket de cinéma.
Plus tard après avoir pris un tout petit peu d’age, vers les 13, 14 ans, j’ai arrêté mes expéditions dans les quartiers chics. Toujours pour pouvoir obtenir un peu d’argent, j’allais dans la forêt , cette forêt a l’entrée de laquelle j’ai passé la moitié de mon enfance et qui s’étend sur 40 km, jusqu’à la capital (Rabat Salé). On devait partir à 2, pour chercher les sacs de châtaigne qu’on vendait ensuite. La moitié allait à mes parents, et le reste : argent de poche. Dans le temps on avait peur de nos parents, de faire des bêtises. Il y’avait des choses qu’on savait ne pas devoir faire : ne pas se disputer entre nous, fumer une cigarette ou jouer aux cartes avec l’argent. Moi, à la maison je ne bougeais pas mais dehors j’étais un aigle. Mon père avait été soldat, tirailleur, intégré d’office. Ma mère était une bonne mère de famille qui restait au foyer et elle était respectable et respectée. Et je peu dire qu’ils ne m’ont jamais puni. Pourtant j’étais chaud avec les copains, on volait, on fumait des cigarettes et on jouait les hommes durs, mais mes parents etaient juste et il ne m’interdisaient que les choses graves. Je n’ai commencer àfumer qu’à l’age de 18 ans. A la maison dans ma famille il y avait aussi un frère qui m’a marqué et que j’aimais bien. Son prénom c’était Larbi, le roi de la nuit, on lui avait donner ce surnom parce que pendant que nous on bougeait, lui il ne sortait pas de la journée de la maison. Il sortait la nuit, toute la nuit et rentrait vers 5h ou 6h du matin. La plupart du temps il n’était pas en jean, il s’habillait en costume blanc et noir.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:17



J’ai grandi un peu et j’ai commencer a jouer au football et je me souviens très bien de l’ancien football brésilien du temps du roi Pelé. On avait formé une équipe de jeunes en se cotisant pour acheter le ballon. La Plupart jouaient pieds nus, c’était rare à l’époque de voir un jeune jouer en espadrille. Pieds nus, on se sentait plus léger qu’avec des chaussures trop chers pour nous. On organisait des matchs quartiers contre quartier . C’était surtout l’été qu’on faisait des tournois. Il y’avait des plus jeunes qui tournaient autour de nous et qui voulaient avoir une place dans l’équipe.
J’ai grandi dans un village franco-américain nommé Kenitra City. A la base américaine, il y’avait une radio américaine que nous étions les seuls à pouvoir capter. Pendant toute mon adolescence, j’ai écouté cette radio qui passait tous les nouveaux disques qui venaient des Etats Unis et qui m’a fait découvrir toutes sortes de musiques : jerk, jazz, rock, etc.
Sinon dans le temps il y avait chez nous un chanteur qui s’appelait Hocine Slaoui que je trouvais parfait et qui est mort aujourd’hui.
Je n’écoutais pas vraiment la musique marocaine, mais surtout mes 4 chanteurs préférés de l’Egypte : le professeur Mohammed Abdel Wahad, la chanteuse Oum Kaltoum, Farid et Abdel Halem Hafid, quatre chanteurs que tout le Maroc écoutait a l’époque. Tout cela se sont des souvenirs qui reviennent et il y a plein d’autres choses à raconter. En 1968, ils m’ont appelé pour le service militaire. Nous étions nombreux dans la famille, et je n’étais pas obligé de partir mais comme j’avais 18 ans ½ et que j’étais encore au collège avec un niveau de rien du tout (5ème)…

SERVICE MILITAIRE
Quand je suis rentré à l’armée, j’étais un gamin en bonne forme physique. Il le fallait parce que l’instruction est très physique.
C’était dur. On a d’abord commencer par être obligés de faire des bonnes marches qui allaient de 20 à trente km avec tout le paquetage réglementaire. C’est a dire sac a dos toile de tente, outils individuels. Il faut bien tenir le coup. On etait réveillés à 6 Heure et on démarrait tout de suite par la gymnastique. Tous les jours pendant une heure.
On avait tous les mouvements à faire, c’était seulement après qu’on pouvait rentrer prendre une douche et s’habiller pour le petit déjeuner vers 7 h 1/2 . C’était bien organisé. Le matin, on s’entraînait physiquement. C’était la formation pratique : les combats de corps à corps avec l’armement. L’après midi on avait les études théoriques c’est a dire surtout le règlement militaire, la discipline, comment être prêt en 2 secondes a la sonnette avec tout le monde habillé vite fait. Moi dans tout ça, j’aimais bien le tir. Dés ma première leçon j’ai obtenu un très bon tir de groupement. J’étais très doué, j’ai appris à bien visé avec les anciennes armes françaises : Le Mas 36, Le FM 2429, le P.M.M.A.T. 49, et la carabine 5-5. Nous avions aussi un fusil garant qui était de modèle russe (M 49).
Enfin ce qui était dur surtout, c’était qu’on était commandés à l’époque par les goumis, les anciens galériens de l’Indochine, du Congo, et aussi pour les plus anciens : 39-45. Les goumis, c’était l’enfer, et tous nos officiers l’étaient. Il y en avait même un qu’on appelait assassin, un adjudant chef AKKA, chef de détention de la prison, et garde du corps du commandant Ababou, chef de caserne.
C’était vraiment un méchant celui là. Ils étaient chargés des prisonniers qui avaient des peines sévères à accomplir. C’était lui qui devait les appliquer. Tous les matins on les voyait sortir avec eux de bonne heure à l’extérieur de la caserne pour les forcer à faire des travaux qui ne servent à rien comme faire des tranchées dans la terre n’importe ou et rentrer juste pour manger parce qu’il fallait qui ressorte pour continuer à creuser quelque soit le temps, en plein soleil ou sous des trombes de pluie, pareil. Les autres goumis, il y avaient des différences mais ils étaient finalement tous comme lui, le même genre : ils avaient inventer leurs propre façon de parler, à la goumi.
Ils s’arrangeaient pour qu’on ai du mal du comprendre ce qu’ils disaient et au début, on avait du mal à savoir ce qu’ils racontaient. Il fallait apprendre à traduire. Exemple : au lieu de te dire « suivons », le goumi disait « suifons ».
Et ils continuaient le jeu entre eux jusqu’à ce que « suivant» devienne « drana » (le dernier). A nous de les suivre.
Certains parmi eux frappaient les appelés. Chez les sous officiers ceux qui étaient les plus gentils étaient les instituteurs, les sergents formés à l’école de Harmonou (Fès), une école de gradés. C’est eux qui étaient chargés de notre instruction théorique.
Ma période d’instruction s ‘était déroulée dans un village : EL Hajeb, situé entre Fès et Mekhnès. Il devait y avoir environ 1000 habitants à cette époque en 1969. Et à notre grande caserne 2200 personnes. Le village était devenu une petite ville à moitié militaire et à moitié commerçante. El-Hajeb se trouvait en pleine campagne, une belle campagne avec un bon climat ou tout le monde peut boire l’eau de source de montagne. C’est que nous sommes là dans le plein Atlas. En hiver, il fait froid et en été c’est chaud mais sur les hauteurs, tout est tempéré par l’oxygène et l ‘eau. A l’heure actuel El hajeb a grandi et c’est maintenant une ville marocaine ou la population et 10 fois plus nombreuse que dans les années 60. Nous, les appelés, on désertait. Nous n’avions pas l’autorisation de sortir tant que notre instruction n’était pas terminé. Mais les cinq mois étaient dures. Alors dés qu’on pouvait, on allait chercher de l’ambiance au village dans les endroits ou l’on pouvait se distraire. Les gens étaient très gentils et chaleureux avec nous. Ils savaient bien que nous étions déserteurs. Mais ils nous invitait quand même à boire le thé à la menthe. Et cette complicité faisait qu’un grand courant d’amitié passait entre les appelés et les habitants. Bien sûr, les gradés savaient qu’on désertait et c’était un tout petit peu toléré ? mais quand même interdit. Le tout était de ne pas se faire prendre parce qu’alors on avait droit à la prison. Celui qui se promenait une toute petite après-midi avait déjà droit à _une peine entre 3 et 8 jours de prison. Mais les déserteurs qui ne rentraient pas tout de suite devaient s’attendre à être très sévèrement puni. Nen fait, si on désertait parfois dans la journée, c’était surtout la nuit qu’on sortait.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:18



L’instruction a pris fin et on a alors eu droit à une grande permission de 15 jours. Ensuite quand on est rentré, on nous a demandé de choisir le bataillon ou on allait devoir finir le service militaire. Il y avait le choix entre plusieurs propositions : la marine, le génie, l’aviation, l’hôtellerie. Pour ceux qui avaient une préférence, ils pouvaient vraiment s’inscrire ou ils voulaient. Moi, pour être franc je n’aimais pas plus que ça, d’être militaire, et j’ai choisi l’hôtellerie.
Cela peut étonner qu’on puisse faire de l’hôtellerie à l’armée, mais il faut savoir que chez nous depuis 1965, le tourisme était devenu une affaire nationale, et que le Maroc développait de grandes formations d’hôtellerie. L’armée avait sa propre école et nos formateurs étaient diplômés d’une école d’hôtellerie de Nîmes. Ils étaient moitié français et moitié marocains. La, dans ce petit institut prés de Marrakech, on apprenait les trois métiers qui composent l’hôtellerie : réception, restauration, et cuisine. Sans oublié e savoir vivre. Au début on m’a placé à la restauration. Il fallait apprendre à servir et à faire la mise en place des tables. J’ai donc expérimenté et pratiqué les trois méthodes en vigueur pour s’occuper des clients : service à l’anglaise, à la française et celui du plat au choix. Je n’aimais pas la restauration, et je demandais à partir en cuisine. Cela à été accepté. Et c’est là que j’ai pu gagné mon diplôme ministériel de cuisine qui me servira tant, bien plus tard. Dans ce stage, chaque jour on nous faisait apprendre des choses nouvelles, on nous laissait pas respirer. Il fallait que le métier rentre ; c’état leur méthode. Le métier de cuisinier, c’est un m étier ou tu apprends vite quand tu as envie de le faire. Il y a une chose personnellement, je peux dire que pour savoir le métier, il y a deux qualités indispensables : 50 pour cent c’est le savoir faire, mais c’est également 50 pour cent, le cœur. Ce que tu mets de to même dans ce que tu fait. Si tu as les deux, tu seras vraiment un bon cuisinier. La cuisine marocaine, c’est facile à apprendre. J’avais déjà l’habitude d’en bricoler chez nous. On mange bien dans les hôtels et aussi dans les familles. Toutes les femmes de chez nous, en principe, savent faire la cuisine mais seulement pour une petite quantité de personnes. Elles savent faire le pain également.
Méchoui, couscous brochette, couscous poisson, la cuisine marocaine est une des meilleurs du monde. La première pour ce qui est du poisson. Largement en tête en Afrique. La Turquie fait également de la bonne cuisine. D’autres pays aussi touchent bien, mais seulement dans une spécialité, comme le Liban pour les gâteaux. Nous à l’école, quand on n’étaient pas en cours, et quand on se retrouvait entre nous, on faisait la cuisine marocaine, parce que sinon on apprenait surtout la cuisine française, la première au classement. La meilleure du monde, avec des milliers de sauces ! et tops de variétés… C’était une école ou il n y avait que des lions qui en sortaient diplômés. Au début de l’année 1969, je me souviens de la visite d’un général, Driss ben Omar. On était 5 à être chargés de lui prépare son méchoui. La première fois que je tapais la broche. Il fallait constamment assurer on avait des interrogations tout le temps, comme au lycée, 1000 personnes en tout, qui apprenaient en même temps les métiers de l’hôtellerie. plus je rentrais dans le métier, plus j’aimais. La cuisine, pour moi, c’est un métier d’artiste. C’est difficile. Si tu triche tu n’auras jamais le cœur blanc, celui de l’artiste qui a le métier complet et de celui qui de tout son cœur fait, avec plaisir, une cuisine saine. A l’école c’était dur, mais on était à l’aise. Quand j’y repense, c’est autre chose. C’est le vrai restaurant. Quand tu fais à manger pour des gens qui payent, tu est responsable devant eux. Ils comptent sur toi pour manger des bonnes et belles chose. Des plats sains et pas gras. La cuisine st un endroit ou il ne faut pas jouer. Je veux dire par là qu’il ne faut pas travailler avec des boites de conserves, des produits bon marchés qui ne valent rien.
C’est pourquoi moi si je classe la cuisine française en tête, je fais la distinction entre la cuisine 5 étoile et la cuisine modeste. Les restaurant moyens, ça va encore, mais les restaurants à 50 francs et même un peu plus, il y a trop de boites de conserve qui tournent dans l’affaire. Le roux (farine, margarine) sert trop souvent à cacher les misères des sauces. C’est cher, trop cher pour ce que c’est. Admettons un menu ou le plat revient à 5 francs, le patron se permet de le vendre jusqu’à 60 francs. Ces gens là me mettent la rage.
Avec un petit budget, on peut faire beaucoup de choses biens.
Faire une cuisine saine, de bon cœur et avec plaisir, ce sont des principes de base. Ce sont des choses que j’ai commencé à apprendre à l’armée. A la fin, il y a eu l’examen et je me souviens que pendant un concours, il y avait entre autre, une course ou il fallait porter un plateau rempli de verres à bout de bras sans perdre l’eau. Un bon souvenir. J’ai réussi l’examen et j’ai quitté le service militaire avec le diplôme de cuisine française délivré par le ministère du tourisme et des beaux arts.
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LE CONTRAT

A ma sortie du service militaire, j’ai eu l’occasion de continuer dans la restauration, mais j’ai fait un autre choix qui a changé ma vie. J’étais gamin, je n’ai pas réalisé la vraie valeur des deux propositions qu’on m’a alors soumises : travailler dans deux grands hôtels. C’est sûr que si j’étais rester au Maroc, je toucherais beaucoup plus d’argent qu’actuellement. Et que surtout je ne serais pas « double peine » à Paris.
Sans doute, mais moi à l’époque, je voulais venir en France. Il faut comprendre que plusieurs de mes copains avaient déjà fait le voyage. Un de mes frères était même parti depuis 1964, et s ‘était fixé en Belgique. Les marocains voyaient la France riche à ce moment là.
Pour comparer le Maroc dans les années soixante représentait 6 millions d’habitants c’était un pays beaucoup moins civilisé, moins moderne que maintenant ou la population est beaucoup plus nombreuse. Tous les marocains mangeaient à leurs faims, mais il n’y avait pas beaucoup de travail et pas d’argent. Par contre, en 1969, la France a besoin de bras et on peut gagner y beaucoup plus que chez nous. D’autant plus que la vie était beaucoup moins cher alors à paris que maintenant. C’est pourquoi quand on m’a proposé l’hôtel El Mansour à Marrakech, et l’hôtel Transat à Mekhnès, 2 hôtels portant 5 étoiles classe A. J’ai refusé leur salaire misérable !
J’ai obtenu l’inscription du contrat de travail contre 250 F, et une bouteille de whisky. Il y avait ensuite deux tests à passer : le premier d’aptitude physique, et le second psychologique.
C’est à dire : plusieurs examens, preuves de rapidité en plaçant des boutons. Sinon, il fallait montrer que tu avais des bras et que tu étais assez fort pour tirer 80 kilos.
A la visite médicale, le docteur te regardait partout. Avec en plus prise de sang et radios. J’ai fait tout ça et deux mois après, j’ai reçu le contrat et le passeport pour venir en France chez Simca (Peugeot). Les méthodes employées pour trier les volontaires méritent qu’on s’y attarde. Il faut déjà voir l’ampleur de l’immigration : le contrat pour Poissy a représenté au total 4000 personnes venues aussi bien de la campagne que de la ville. Une embauche partagée entre la région de Mekhnès et de celle d’Agadir. Dans chaque localité, il y’avait un bureau de chômage qui s’appelle chez nous Bureau de placement. Tout les matins, les chômeurs se retrouvaient devant la porte, et comme tous les contrats étaient à peu prés pour la France, il y avait du monde, partout dans toutes les villes on en discutait avec les voisins, les amis en pensant à l’argent, à l’aventure. Le Maroc était le premier pays pour la politique d’immigration de la France ? Après y avoir commencé en 1965, il s’est arrêté mais avait repris comme jamais, avant et au moment de mon départ.
En plus des 4000 personnes dont j’ai déjà parlé, il faut ajouter 2000 autres marocains pour Citroën à Paris et 3000 chez Sochaux. Il y avait plusieurs méthodes pour nous sélectionner. Je ne sais pas comment cela s’est passé pour ceux qui ont été recrutés pour Sochaux et Citroën. Mais je peux parler de l’ensemble pour Poissy et si j’ai envi d’en parler, c’est qu’il faudrait que tout le monde sache comment les 1700 volontaires d’Agadir ont été véritablement tamponnés comme des moutons. Ces gens là étaient vraiment maltraités. Les responsables du bureau de placement faisait mettre les candidats en colonne par groupes de trente ou cinquante. Ensuite, il prenait un tampon et remontant le rang en tamponnant chaque personne. Certains étaient fragiles et recevaient le tampon sur le cœur et ils s’évanouissaient. On les transférait alors à l’hôpital et il était ainsi déclaré inapte à travailler. Oui, vraiment tamponnés comme des moutons. C’était comme à Agadir, il inscrivait les gens.
Dans les autres villes, Kenitra, Casa, Mekhnès, El houssima, Eljedida, Marrakech, on était traités plus correctement puisqu’on échappait au tampon. Mais là, c’était la triche qui intervenait sur les contrats. Deux gars -un marocain qui s’appelait Ahmed, d’Agadir et un algérien, Shérif, qui était Harkis- anciens responsables du Widadia (c’est une association qui s’occupait des émigrés marocains en même temps qu’elle faisait délégué du personnel), et deux chefs du personnel de Poissy étaient venus spécialement pour recruter sur place par eux mêmes. Et ils en profitaient pour faire leurs affaires et vendre les inscriptions. C’est comme ça que mon contrat, je lai acheté avec une bouteille de Whisky et 250 F. Ce qui représentait beaucoup à l’époque. Le recruteur ne s’était pas gêné ensuite pour me dire que pour mon frère également, il n’y aurait pas de problème pour partir et qu’il suffisait de lui offrir encore telle chose et telle autre…
Il n’y avait pas moyen de faire autrement si on voulait venir. Et moi, c’était mon cas, je n’avais aucun doute à ce sujet. Je suis arrivé tout frais en France, tout frais pour être robot. J’étais jeune, je ne savais pas que ça allait durer, et je n’avais pas d’idée de ce que j’allais faire exactement ici. Le 12 septembre 1969, j’ai débarqué en France avec une centaine d’autres marocains de Kenitra et de Mekhnès(50/50). A Talbot, ou je me retrouvais, nous étions 4000 à venir par l’office d’immigration pour compléter l’effectif de 26000 ouvriers. (plus tard, 1200 turcs viendront encore grossir l’effectif)
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:19

Nous venions remplacer le portugais partis dans le bâtiment. A vrai dire le 2 septembre 69, je n’ai vu de Paris que la gare d’Austerlitz. Les autocars nous ont conduits directement devant l’usine. La première image de France qui l’a marqué, a été celle du pont détruit par les allemands.
Aussitôt descendus du car, une visite des locaux dans la journée, et le lendemain : en chaîne direct !
Je n’avais jamais vu une usine comme celle là. Au Maroc il y avait bien Simca et Renault, mais les usines n’avaient rien à voir avec celle-là. : elles étaient beaucoup plus petites. Et celle là ressemblait à une base américaine, avec ses 5 bâtiments, peut être même en plus grand ! Il y avait les ateliers B1 et B2 et B5 qui produisaient les pièces et le secteur B3 qui montait les voitures. Un dernier bâtiment abritait le CKD. Cette usine, c’est toute une histoire. Quand je suis arrivé elle s’appelait Simca et on travaillait sur les Simca Aronde, Simca 1100, Simca1000, des modèles qui ont marqué leur époque et qui n’existent plus. Maintenant, les voitures ont été améliorées, et on produit plus avec beaucoup moins d’effectifs. On ne dit plus Simca, maintenant, mais Peugeot Talbot.
Premier jour : pas le temps de souffler, donc. Tout de suite direction les chaînes, chaînes d’enfer, ou les robots humains s’occupaient de la production de 2000 voitures par jour, fidèles à leurs postes. La centaine de personne venant de Mekhnès et Kenitra ont étés dispersés dans toute l’usine, entre B3 et les quatre autres ateliers. Nous nous sommes retrouvés sur les chaînes, ou il n’y avaient que des étrangers qui travaillaient parce que c’était dur et que personne d’autre ne voulait le faire. Même les portugais qui sont des gens robustes, on ne peut pas dire le contraire, ont abandonnés. Ils ont essayé la bâtiment et ils ont vus que c’était le bon tuyau pour eux, bien plus intéressant. Les portugais sont partis et ont réussi alors que les nord-africains eux sont restés dans l’usine et que la plupart maintenant chôment. Il faut voir ce que c’était comme travail. Devant toi, la chaîne passe de 20, 30 km/h, chacun sa pièce. Et il faut assurer le même geste sans cesse répété. On est toujours débordés par le temps.
Moi, chaque jour je faisais des matchs de football de 10 heures avec une mi-temps de 32 minutes. On travaillait en équipe de 10, c’est à dire : 2 fois 10 heures. Enfin, c’est ce qu’il y avait écrit sur le papier. Parce que si c’était vrai le jour, c’était faut la nuit. Dans cette équipe là on commençait à 16 h. et on finissait à 3 h ¼ du matin. Et ils appelaient ça les deux dix, mais c’était tricher parce qu’ils s’arrangeaient pour nous faire faire les heures supplémentaires et que tu pouvais difficilement refuser. Pour ce travail là, on me donnait 4 francs et 8 centimes par heure.
Ma première impression de Poissy, cela à été que la ville était trop petite. Les premiers jours, juste quand je venais d’arriver, cela m’a fait bizarre parce que j’étais habituer à vivre dans une grande ville et que là, il n’y avait que 3 ou 4 cafés, pas beaucoup d’habitants. je découvrais une petite cité en banlieue, dans les Yvelines, au bord d’un fleuve, la Seine, et les ruines d’un pont que les allemands ont détruit et que les immigrés ont reconstruits : l’histoire du pont est intéressante, parce que les cadres de chez Talbot ont fait une chose grave, et qui m’a personnellement concernée
Ils ont installés les bidonvilles autour de Simca. Ils avaient trop de monde à l’époque. De 1969 à 1971, 4000 personnes sont arrivées en 1 an. Avant il y avait un foyer mais celui-ci n’était pas suffisant alors ils ont construit tout autour des baraques. Il y avait la cité N°1, la cité N° 2 et le foyer des Bâtiments. Moi, j’ai fait les trois.
Le travail, c’était la chaîne et le sommeil, c’était les bidonville. La dedans, c’était comme si c’était la prison. Tu étais surveiller par les flics de Simca . Tu n’avais pas le droit d’inviter un copain de dehors et de le faire rester trop longtemps. A une certaine heure, on devait éteindre la lumière. Quand je suis arrivé, deux par chambre, comme les soldats. Quand on sait que la comptabilité de Poissy t’enlevait un tiers de ton salaire pour le logement. On peut considérer que nous étions dans une situation de double esclavage, entre l’usine et le toit. Les gens n’étaient pas libres, ils étaient obligés de retirer de l’argent de leur salaire pour un gardien qui allait les surveiller. Dans les bidonvilles, il n’y avait pas d’hygiène, 2 douches, 2 lavabos et 2 toilettes pour 50 personnes. Deux par chambre comme je l’ai dit, mais aussi par trois. Les douches étaient froides. L’hiver, il faisait froid dans les baraques. Heureusement, on ne sentait rien. On arrivait à supporter parce que la plupart d’entre nous, on venait du Maroc, jeunes et plein de force. Il faut quand même avouer que certains d’entre nous sont tomber malades, des gens ont attraper des ulcères, d’autres ont préférés repartir au pays. Parmi nous, sur la centaine de personnes de la province de Kenitra, une vingtaine ont lâché le contrat. Et si je fais le compte de ceux qui restent en France au bout de 20 ou 30 ans, je vais trouver une dizaine, pas plus. Les bidonvilles, ça a duré un an et demi. Quand ils ont fait assez de profits sur notre dos, ils ont bien voulu construire les foyer ADF. Là il n’y a rien à dire. Tu as droit à une chambre seul ou à deux, mais c’est comme tu veux. C’est un bon endroit pour avoir plein d’amis et quand tu es ancien, tu es connu comme la vache blanche au milieu du troupeau. Je me souviens que pour moi, à l’usine, c’était l’enfer et en sortir c’était le paradis. Le samedi et le dimanche, on se rencontrai au marché ou on faisait les courses qui allaient assurer notre bouffe pendant la semaine. C’était aussi le moment ou on prenait tout notre temps pour faire ensemble notre tiercé. La ville était pleine d’étrangers et on se connaissait tous. La moitié des 26000 ouvriers de Simca habitait à Poissy et dans les Yvelines et on peut dire que grâce à l’immigration, la ville est devenue une des plus belles des Yvelines, une des plus riche et également une des plus raciste, communiste et de droite ! Il y avait également plein de jolies filles et dés que je pouvais je sortais faire la fête.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:20

Quand tu es jeune, c’est normal, tu fais la fête. Quand je suis arrivé au niveau financier , c’était bien, la vie était beaucoup moins cher. On touchait alors 400 francs par quinzaine(la baguette faisait 45 centimes) et si j’envoyais la moitié aux parents, l’autre moitié, je la gaspillais. Je faisais la fête, tout ce qui me permettais de sortir. J’allais au bal dans les Yvelines en évitant Poissy, parce que là, c’était la hagra pour les étrangers, le racisme. J’essayais de venir souvent à Paris. Quand je descendais, j’allais chez ma sœur. Je rentrais par le train de une heure moins le quart. Parfois je dormais à l’hôtel. J’avais un copain de Kenitra qui était un bon ami qui s’appelle Hamid Farhat. C’est avec lui qu’on faisait le tiercé et toutes les fêtes. On allait en Belgique et on a été également en hollande.
Dans l’usine, il y avait toute sorte de gens, c’était tout un monde. Il y avait des femmes avec nous à l’atelier des « élastiques ». Une chose dont il faut parler, c’est la coutume d’apporter des cadeaux aux contremaîtres. Beaucoup de gens faisaient ça. La moitié, je les regardais avec méfiance comme des personnes du genre à balancer leurs collèges dans l’usine, à créer des problèmes à leurs frères. Enfin, ils n’étaient pas les seuls/ c’était vraiment courant à Simca, en particulier si tu voulais une augmentation de salaire. Normalement, le personnel était augmenté tout les ans, e puis c’était tout. Mais cela pouvait être variable si on savait si prendre, c’est à dire, en amenant des cadeaux. C’était la seule chance d’obtenir une augmentation, parce que sinon, l’ouvrier pouvait être capable et bien travailler, il n’avait droit à rien. C’était la loi dans l’usine. Les contremaîtres se conduisaient comme des propriétaires d’esclaves : « travailles ou je te fout à la porte, amène un cadeau ou je te licencie ». Chez eux, ça devait ressembler à un bazar, Ils recevaient des théières, des tapis, des objets artisanaux… Il y a même un gars qui a, un jour, offert un singe à un petit chef. Ce genre de cadeau était distribué à Orly discrètement.
Un jour, il m’avaient affecté dans une nouvelle équipe, assez petite, une cinquantaine de personnes. C’était courant, j’avais l’habitude de changer de poste, pas de problème. Mais quand je suis arrivé, j’ai vu que les marocains payaient le Ricard à la maîtrise et cela m’a donné une idée. J’ai attendu de m’intégrer dans l’atelier et ensuite j’ai demandé au contremaître à pouvoir partir au Maroc 3 mois en congé sans solde. Le marché était simple : « Je t’offre 3 bouteilles de Ricard ». Il m’a répondu qu’il ne pouvait pas m’accorder les trois mois mais que pour deux, il fallait voir. J’étais content, je considérais que c’était une bonne réponse mais je ne l’ai pas montré. Et j’ai mis comme condition pour apporter le Ricard que toute l’équipe en profite. Il était d’accord et on a bu à peu prés toute la semaine. J suis parti en vacance et quand je suis revenu j’ai vu que c’était devenu courant, et que tout le monde pouvait boire et pas seulement les chefs, j’avais changé en bien la tradition.
Le 30 novembre 1972, j’ais eu un accident, un de mes doigts a été coupé sur le coup. C’était une période ou l’usine avait beaucoup de commandes de voitures, beaucoup trop et on nous demandait d’assurer plus qu’on ne pouvait. De plus, l’atelier de coussins, de sellerie, avait été transférer à Valenciennes. Ils nous avaient disposés à différents postes, comme ils pouvaient. On était sur des machines à coudre, et la mienne, une petite presse à pédales n’avait pas de système de sécurité. La machine agrafait et attachait le coussin à la carcasse avec des élastiques. On devait donc en agrafer 2000 par jour, le pied toujours sur la pédale. A un moment, la machine a été coincée par les agrafes, et j’ai mis mon doigt sur la presse, et j’ai appuyé… Coupé sur place, une phalange ! Mon doigt perdu. Parmi nous, les robots, il y avaient ceux qui perdaient leur bras, d’autres un pied, alors une phalange… Quand on regarde un peu plus prés, on trouve pas mal d’étrangers accidentés dans les usines de voitures, Citroën, Peugeot, etc. Pour moi, bien sûr, mon doigt coupé appartiens au monde de la souffrance. Mais est-ce que la vraie, ce n’est pas la double peine ? Un doigt, ce n’est pas la vie. Je serais prêt à avoir un autre doigt coupé et à être rester avec mes papiers!
A L’époque où je travaillais, j’avais mes papiers et j’avais pleins d’amis et cela a toujours été comme ça dans les foyers, des amis de toutes nationalités. J’étais gentil, j’aidais les gens qui me le demandaient, toutes sortes d’aide. Je m’occupais des malades, des décès, des quêtes. J’écrivais même des lettres pour mes amis qui ne savaient pas écrire. J’étais devenu pour certains une sorte de parrain, gentil, cool. A Talbot, il y’avait une équipe de football corporative, une grande équipe, celle qui représentait l’usine et en dessous, comme nous étions 26000, il y’avait dix équipes qui faisaient un championnat entres elles. Je suis passé par là. Ensuite, ils m’ont mis avec la sélection officielle, « la grande équipe ». On s’entraînait trois fois par semaine. En plus du plaisir de jouer au football, cela me permettait « gratter » sur mes heures de travail quand j’ étais en équipe de nuit.
Au début , quand j’étais arrivé, on touchait entre 800 et 1200 francs (quand on travaillait le samedi et dimanche). Cela a duré 1 an et demi, et puis en 1972, on a été augmenté d’un coup de 4 à 8 francs de l’heure. En fait, petit à petit, je m’étais fait une autre vie qu’au Maroc : je jouais au football, on travaillait, on était solidaires entre nous, j’avais pleins d’amis, j’avais oublié mon métier de cuisinier.
LE LICENCIEMENT
Ils ont commencé à licencier. Cela ne s’est pas fait en un jour. Les licenciements ont durés longtemps : dix ans, de 1979 à 1990. Ils se sont mis à remplacer des hommes par des robots et cela ne voulait pas dire que l’usine marchait mal. La preuve : elle a eu le temps de changer 4 fois de patron. Au début, les patrons, c’étaient ceux de Simca, ensuite Chrysler, puis Talbot, et enfin l’usine s’est associée avec Peugeot, et c’est devenu Peugeot–Talbot.
C’est comme cela que cela c’est passé. Et à chaque fois que l’usine changeait de nom, cela lui permettait de réviser le nombre de fiches de paye, elle perdait les ouvriers. Il y avait des licenciements. Au bout du compte, plus du tiers du personnel ont été remplacés par des robots, et ils ont gagnés puisque le chiffre de production est resté le même. L’usine fabrique toujours 2000 voitures par jour, mais les postes sont maintenant occupés par des robots et il ne reste plus que 8500 personnes sur les 26000 d’autrefois.
Sur les 8500 employés que compte le groupe, les patrons sont encore décidés à réduire le personnel dans l’ensemble des usines qu’ils possèdent : Valenciennes, Mulhouse, Poissy, … Ils partent de 4000. Quand ils ont commencé à licencier, ils ont mis sur une liste ceux qu’ils voulaient virer. Dessus il y avait 10% de français à mettre en préretraite, et le reste, 90 % d’étrangers,… Chaque année, ils ont fait une nouvelle équipe, et chaque fois un robot remplaçait un homme. Pour nous cela voulait dire que la France n’avait plus besoin de nos bras. Nous étions une bonne main d’œuvre dans les années soixante. De Gaulle avait lancé l’immigration marocaine. Pompidou a continué avec également des portugais et les Nord-africains. Il a même accéléré le mouvement. Et quand la France a pris Giscard, lui, s’est mis à virer les immigrés. M. Mitterrand, son idée, c’était d’appliquer le système de production à la japonaise et de casser complètement les gens en les virant au chômage technique. Ce n’est un secret pour personne. Tous les gens qui ont fait science politique, tous ceux qui font de la politique en France, tous ceux qui ont fini au pouvoir, qu’il soient ministres ou pas, leur travail a été ensuite de casser les étrangers. Ils nous font venir et après ils nous expulsent.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:21

Drôles de gens… Pendant la guerre, les français ils étaient amis avec nous et ennemis avec les allemands. Maintenant c’est le contraire. Qu’est ce que nous, les immigrés, devons en penser… ? Il faut voir comment certains ont été expulsés après avoir été licenciés. Je pense en particulier à deux marocains de Talbot. L’un venait d’un petit village, Zaio, situé prés d’Oujda, et l’autre de la région d’Agadir. Ces deux là, je m’en rappelle bien parce que il avait à peu près le même nom. Le premier s’appelait Sadiqi Ahmed, et l’autre : Sadiqi Lahsen. L’un avait travaillé dans l’usine 14 ans et le second 10 ans. Les deux ont étés « remerciés », mis dehors en licenciement économique.
Après Talbot, ils ont passés un an de formation, et deux ans de chômage où ils ont encore pus toucher de l’argent. Ces deux là, ils n’ont pas eu de chance. C’étaient des gens gentils, timides, qui ne savaient pas se démerder. Leur erreur a été de ne pas sortir de la ville pour chercher ailleurs du travail, parce que Poissy, c’était petit. Ils n’ont pas osé et le résultat, c’est qu’ils se sont sans rien : les papiers périmés et fin de droits. Ils sont paris à la préfecture pour régulariser leur situation et c’est là qu’on peut dire qu’ils n’ont pas eu de chance. En effet, c’était en 1986, c’est à dire, pour ceux qui se souviennent, le moment ou Pasqua a pris le pouvoir. Les policiers ne se sont donc pas posé de questions. Ils les ont retenu et emmenés ensuite directement au centre de rétention de Versailles, expulsion immédiate… Ces gens là n’étaient pas des délinquants, ils n’avaient jamais commis un délit. Non seulement cela, mais Sadiqi Ahmed et Sadiqi Lahsen avaient tout de même travaillé 12 ans chez Talbot, ce qui voulait également dire qu’il avait cotisé au moins 150 000 F chacun, pour la sécurité sociale, chômage, etc. sur leurs fiches de paye. Donc 150 000 francs pour tout le monde ! Eh bien, non !…, expulsé ! Pour moi, ce n’est pas une double peine, c’est pire. C’est un massacre gratuit sans aucune justification. Moi aussi, j’avais participé à toute l’histoire de l’usine. De Simca à Peugeot Talbot, en passant par Chrysler, je n’ai pas non plus échappé au licenciement. J’ai du quitter l’usine, on était obligés, pas de problème. On avait pas le choix. Licenciement économique, comme les autres, je ne me suis pas inscrit au chômage. A Poissy, j’étais connu, j’ai fait un ou deux petits boulots à droite et à gauche et puis pratiquement direct après mon départ de l’usine je suis parti au Maroc. J’ai passé quelques mois au Maroc et quand je suis revenu, je n’ai pas eu à m’occuper de comprendre ce qu’était le chômage, je me suis retrouvé à travailler dans une boulangerie.
LA BOULANGERIE
En effet, quand je suis revenu au Maroc, j’ai cherché du travail tout de suite en intérim. Je ne suis pas feignant. Et le premier mois j’ai fait ainsi quatre patrons différents. Un jour un copain qui s’appelait Hamid Farhat et travaillait à la boulangerie Sofrapain est venu me dire que je pouvais avoir un emploi stable dans son entreprise et m’a pistonné pour y rentrer. Autant le dire tout de suite, Sofrapain, ce n’était pas le genre petite boulangerie en bas de chez soi, mais bien plutôt une usine, une fabrique industrielle et de pain. Avant j’avais fait le robot à Talbot et là, je me suis retrouvé semis robot. Il y avait un changement effectivement, je n’étais plus dans la ferraille mais dans l’alimentation. Sinon, les machines ne s’arrêtaient jamais et je crois que je peux dire que c’était plus dur que l’usine automobile. Parce que on était obligés de boire beaucoup de lait pour dégager la poussière. J’ai travaillé la dedans 2 ans 1/2. D’abord, il a fallut que je passe l’essai » sur une machine qui partage la pâte. J’avais déjà l’habitude d’être rapide et souple, j’avais bien été rodé par Talbot, ça allait. Je n’ai pas trop de mal à faire l’affaire. J’ai donc été embauché chez Sofrapain. L’effectif se composait de 24 personnes, 24 boulangers. Les chefs étaient 4 français, sans oublier un algérien, ancien dans la boîte qui avait obtenu des responsabilités. Sinon le personnel était pour ainsi dire, uniquement composé de marocains de la région d’Oujda. Nous étions répartis pour moitié dans la pâtisserie, pour moitié dans la boulangerie. Je n’étais pas le seul à venir des chaînes automobiles. Nous étions plusieurs à avoir fait la guerre de Talbot. Comme l’ami qui m’avait pistonné (Hamid).
L’usine Sofrapain était situé à Beauregard à Poissy. Deux kms la séparait de Talbot. Elle marche toujours à ma connaissance. L’usine comportait trois grands fours industriels qui mesurent 30 à 50 mètres de long. Ces fours automatiques sont faits pour un rendement maximum avec un réglage précis et rapide du tapis. On pouvait ainsi faire cuire 18 pains en 66 secondes. Sur ces postes là, il fallait normalement utiliser 2 personnes, mais en fait, il n y avait qu’un seul robot humain utilisé pour bosser dessus. On travaillait 10 heures par jour. La pose était réduite au minimum. D’abord on faisait 5 heures d’affilé. Et puis on avait une petite demi heure pour manger la soupe. Il fallait s’organiser pour que les postes soient toujours occupés, et qu’il y ait un roulement pour remplacer les collègues pendant qu’ils mangeaient.
Des fois, le chef venait nous voir en disant : on est que 20 aujourd’hui, alors on va changer tes horaires, tu commenceras à 7 heures. Cette usine, c’était le désordre, on bougeait tout le temps, de l’esclavage !
Que l’on soit affecter à la boulangerie ou à la pâtisserie, on était au tapis, donc ce n’était ni plus ni moins que du travail à la chaîne.
Enfin je travaillais le plus souvent la nuit, et là, quand même, si je demandais à faire le matin, le chef s’arrangeait pour que cela soit possible tout en permettant de garder la prime de nuit. Dans toute l’usine de pain ou on était, je le rappel, 24, il y avait une dizaine de postes différents et je les ai fait a peu prés tous. Vers la fin, on m’a mis sur une machine à faire les petits pains. Là, on était 2 à bosser sur cette machine qui faisait à la fois le façonnage et le ramassage et il ne fallait pas traîner. Parce qu’il fallait fabriquer 40000 petits pains sur une durée de 4 h 1 :2. Les semis robots de Sofrapain faisaient manger les robots de Talbot.
En effet, ces petits pains étaient moitié destinés à la cantine de mon ancienne usine, moitié à celle de Renault.
On faisait toute sorte de pains en général. Sofrapain les distribuait également dans les écoles, les prisons comme Bois d’Arcy ou la centrale de la ville. Un peu partout. Le pain qu’on fabriquait, on avait intérêt à la manger tout de suite, parce qu’il était façonné à la pile et que s’il était bon en sortant du four, le lendemain on avait plus que du caoutchouc dans les mains.
J’ai dit que le travail était dur. Mais le plus dur, c’était le pain de mie qui se fabriquait dans une boite de ferraille. Il fallait la mettre au four et quand la cuisson était exactement juste, tout l’art consistait à sortir le pain demie de la boite sans dégât. Toujours le plus rapidement possible, alors que c'était brûlant. Quant à la pâtisserie, l’usine fabriquait toute sorte de gâteau français. Une équipe mixte composée d’autant de femmes que d’homme travaillait dans cet atelier. Ils étaient 10 à 15personnes à assurer une pâtisserie plutôt bonne. Alors que cela faisait déjà un an que j’étais chez Sofrapain, le responsable algérien avec qui j’étais bon copain m’a appris comment on faisait du pain en galette. C’était intéressant, je regardais de façon à bien apprendre et après quand j’ai vu que je savais bien le faire, je me suis mis a en faire pour moi, tous mes copains pâtissiers et boulangers ont vu que je savais sortir de la bonne galette et comme ils avaient confiance, ils me demandaient souvent de leur en faire. Moi, je prenais le temps. Au lieu de façonner en une seule fois la galette, je préférais le faire 20 fois, de façon à ce qu’elle dure longtemps, ce qui correspond à ce que je considère comme le meilleur pain. Mes amis qui au début me demandaient de leur faire des galettes ont commencés finalement à en faire à leur tour. Résultat : trois mois après, Sofrapain à intégrer la galette à ses productions et s’est mise à en faire 1000 par jour. J’avais regardé comment faisaient les responsables qui était un ancien, et puis à mon tour, on m’avais observer, et puis cela avait été le bouche à oreille, l’autre s’y était mis et puis l’autre,…
Tous mes collègues s’y étaient mis mais moi, ils ont continué à m’appeler le roi de la galette. Nom qu’ils m’avaient donné au début de mes expériences.
Sofrapain, j’ai quitté moi même. J’y suis resté quand même deux ans ½ mais vraiment c’était dur, c’était trop dur, et j’en ai eu assez. Quelques trois ans après, là aussi, il y a eu des licenciements économiques. Un matériel plus performant a été installé et comme partout, l’usine a enlevé les vieilles machines pour les remplacer par une seule capable de tout faire à elle seule. De fait, cette machine pouvait à la fois confectionner la pâte, la diffuser, la façonner, et pour finir rejeter le pain tout fait, prés à la consommation. Avec un tel appareil, plus besoin de l’aide humaine.
Ainsi, avec les bénéfices qu’ils ont pu réaliser grâce à notre travail, ils ont pu s’offrir cette nouveauté qui leur a permis d’améliorer le rendement de l’usine en mettant par la même occasion la moitié du personnel au chômage.
Je connaissais ça.
Les gens fabriquent le pain et peuvent manger, tout d’un coup arrive un ingénieur avec une cravate qui sans qu’on s’y attende met 10 personnes dehors. « Le plaisir devient malheur », comme le dit l’expression.
Mon expérience en boulangerie m’a servie. J’ai commencé à faire du pain pour mon compte quand j’ai eu l’occasion. Après Sofrapain, au foyer quand je n’avais pas de travail, j’en faisait pour tout le monde, 50 pains par jour à 10 francs l’unité.
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GARDIEN DE NUIT
Deux mois après, j’ai trouvé un boulot, veilleur de nuit.
Veilleur de nuit, c’est à dire que j’occupais un poste de gardien chargé de s’occuper et de surveiller les réfugiés laotiens, cambodgiens et vietnamiens.
En fait c’était au foyer ou j’habitait ou un bâtiment avait été réquisitionné. Le chef du centre qui me connaissait m’avait fait la proposition que j’avais accepté. J’ai donc fait deux contrats de 6 mois à l’ADEF, Association pour le Développement des Foyers Etrangers. Mon travail consistait à garder les réfugiés pendant le nuit parce qu’il étaient tout le temps malades et qu’ils devaient y avoir quelqu’un auprès d’eux. C’étaient des réfugiés asiatiques, des boat people. On devait les héberger jusqu’à ce qu’on leur trouve un logement. Ils demandaient le droit d’asile. Au début, ils étaient 200 en situation provisoire. Ils ont obtenu tout de suite la carte d’identité française et un an après, ils ont obtenu le logement. Il y avaient beaucoup de gamins et beaucoup tombaient malade, au moins un tiers. Le jour, il y avait des médecins, des infirmières, et moi, la nuit, j’étais celui qui était chargé de prévenir en cas d’urgence. Il fallait que je téléphone 2 à 3 fois par nuit pour avertir le docteur à l’hôpital de Poissy qui était tout proche, environ 200 mètres. Ils étaient installés au premier et je restait là à avoir l’œil pour eux. J’essayais de m’occuper d’eux de mon mieux. Je prenais mon travail de gardien très au sérieux. Vers dix heurs du soir j’avais l’ordre de ne laisser entrer personne. Comme je ne parlais pas le vietnamien et qu’ils ne parlaient pas français, nous communiquions par gestes. Ce n’était pas évident mais on y arrivait.
Avant qu’ils arrivent, ils avaient fait déménager le bâtiment qu’ils allaient occupé en mettant les anciens habitants, les immigrés de 1965 et 1969 dans un autre bâtiment à 2 ou3 par chambre. La cantine était fermée, ils l’ont ouverte pour eux. Je raconte cela parce que lorsqu’ils sont partis, ils ont muré le bâtiment appartenant à ce foyer construit en dur par les portugais et les marocains en 1965 au lieu de le donner pour les immigrés. Plutôt que chacun dorme dans une chambre, ça les a amusé de fermer devant eux cet endroit qu’ils avaient construit de façon à ce qu’ils restent dormir à 2 ou 3 par chambre.
Pour eux, les immigrés de l’an 2000 ne peuvent dormir que comme de sardines. Au départ, les foyers ADEF comportaient trois bâtiments : dans chaque foyer il y en avait un de fermé. Ensuite ils ont encore fermé un autre à chaque endroit. C’est comme cela qu’ils font AIR-EXPULSION, les charters pour expulser les immigrés nord africains et africains. Du moment qu’il yen a un en moins.
J’ai quitté le métier de veilleur de nuit en 1982, à la fin de mon contrat.
LA GRÊVE CHEZ TALBOT
Ensuite pendant trois ans, j’ai vécu sans travail fixe, en ne faisant que des petits boulots. Cela veut dire beaucoup de travail en intérim. J’ai également croisé à cette époque beaucoup d’artisans, peintres ou maçons de la région, qui avaient besoin de main d’œuvre.
Il pouvait m’arriver de faire du nettoyage, ou de couvrir les bâtiments avec du polystyrène : j’ai fait un peu de tout.
En 1983, il y a eu une grande grève chez Talbot, et je vais en parler, parce que lorsqu’elle s’est déclenchée, je suis rentré dans l’usine pour participer et aider mes frères. J’habitais toujours Poissy dans le même foyer que les gens avec qui j’avais travaillé. On se voyait quand ils rentraient du boulot, et la plupart d’entre eux me racontaient tout ce qu’il se passait à l’intérieur. C’était un peu comme si j’étais encore concerné. Aussi, quand c’est parti, je me suis senti tout de suite concerné et si j’ai été les aider, c’est non seulement parce que le motif de la grève, c’était les licenciements, mais aussi parce que je savais qu’ils auraient besoin d’aide contre la CSL, un syndicat qui n’hésitait pas à se heurter aux grévistes et avec qui, il y avait de nombreux heurts. Ce syndicat ne valait rien du tout. Ses membres étaient nombreux dans l’usine aussi bien en jour qu’en nuit. C’étaient des fayots du patronat. Ils étaient à l’usine pour encaisser l’argent du timbre, c’est tout. Et le reste du temps, ils surveillaient balançaient les gens. Les délégués CSL me mettaient vraiment la rage. Ils avaient à leur tête trois gars. Un trio d’enfer qui dirigeait le syndicat. Un turc, un algérien et un marocain. Je me souviens bien de leurs noms : un turcqui était d’origine arménienne s’appelait « Chich mania », l’algérien, un harki, « Chérif », et le marocain, qui venait de la région d’Agadir, « Hmad ». avant que la grande bagarre n’éclate, il y a eu une grande explication entre les délégués CGT et CSL avec des matraques. Il y a eu des blessés, des gens menacés, des gars passaient avec de la famille, des barres de fer : « Toi, tu dégage de ton poste .» C’était interdit de travailler, et dans l’usine, carrément la guerre entre étrangers. Des gens ont étés menacés et même tapés chez eux par les délégués CSL. Il y a eu des ouvriers de chaque coté qui se sont retrouvés gravement blessés à l’hôpital. Beaucoup de journalistes étaient sur place, mais la plupart n’ont pas osés tout raconter. Cela a été une véritable guerre.
J’ajoute quelque chose, et je confirme, que les révisionnistes qui ont écrit sur Talbot n’ont jamais dit, ni écrit la vérité.
Guy Dardel sur son bouquin a écrit quelques passages de biens.

La grève a duré un mois et demi. On retrouvait des vieux amis. On se tapait les gamelles, on buvait le thé. Les grévistes ne quittaient pas l’usine. On restait là tout le temps et des fois, ça m’arrivait de dormir avec les copains. On restait ensemble à veiller et à surveiller les postes. J’ai déjà raconté que Talbot ressemblait à une base américaine tellement qu’elle est longue : 1 km au moins. Alors on circulait à l’intérieur avec des vélos en allant d’atelier en atelier. Cela donnait une impression spéciale. Il ne restait personne qui travaillait sauf les cadres et le personnel médical qu’on croisait de temps à autre.
Tout était vide.
A la fin de cette bataille ou tous les étrangers se sont mis en galère, y compris entre eux, il y a eu un vote et la reprise à été décidée. Le motif de la grève, c’était qu’il y avait trop de licenciements. Et les grévistes on considéré qu’ils pouvaient arrêter. C’est vrai, quand la CGT a gagné, la direction a ralenti le rythme des mises à la porte, mais un an après, cela a été à nouveau la même galère.
Le patronat a quand même réussi à licencier les deux tiers de l’effectif prévu.
Trois ans après on peut s’interroger sur ce qu’on peut penser de la grève Talbot, au delà des licenciements. C’était une bataille syndicale et la CGT, avec le temps, on peut penser qu’elle a mouillé les gens dans l’affaire, les a poussé à se battre entre eux parce qu’elle voulait le pouvoir qu’elle a obtenu. Moi je n’arrive pas à aimer les syndicats et pour moi, la CGT se sont des bidons, comme SOS-racisme. La CGT, en 1986 a voté à droite. Dans les manifestations, ils font la sécurité, les policiers. En fait ils font le travail de chiens de garde pour le pouvoir. Voilà ce que c’est la CGT, et à Talbot, les licenciements ont continué.

PETITS BOULOTS
Ma vie dans les petits boulots a continué à Poissy. J’ai donc travaillé chez plusieurs artisans et en intérim.
Les intérimeurs m’envoyaient directement dans les boites. On touchait un salaire minable sans aucune garantie. Quand ils décident que le contrat s’arrête, ils ne se gênent pas. J’étais inscrit dans deux boites d’intérim. La première me faisaient travailler, la seconde, j’y passais quand il n’y avait rien. Ces deux sociétés cherchaient surtout des manutentionnaires. Les boites d’intérim sont normalement là pour dépanner les entreprises alors qu’ils envoient les gens un peu partout. On peut arriver le matin et se retrouver à faire du nettoyage ou du balayage dans une petite entreprise ou une grosse usine ou on ne connaît personne. Dans ce genre de contrat, ils gagnent le triple de l’ouvrier comparé aux artisans maçons ou peintre : eux payent mal. Quand quelqu’un a fini un contrat, on lui dit de passer régulièrement. J’ai rencontrer à Poissy un artisan qui s’était engager sur un grand chantier aux Mureaux. J’ai travaillé avec lui longtemps. Il s’agissait de monter les murs des appartements à l’extérieur avec du polystyrène.
J’ai fait ça neuf mois. C’était dur. Il y avait le froid bien sûr, mais aussi le danger à cause des échafaudages. C’était dangereux. Je me rappel qu’on était attachés avec des cordes et que lorsque les yeux se posent sur la corde que l’on sent le balancement de l’échafaudage, il y a l’angoisse. Dessus, on était trois à bouger, et même quatre quand le patron nous rejoignait. Le boulot était encore plus dur que chez Talbot ou Sofrapain. Avec les artisans, il faut montrer que tu travail : ils ne sont pas dans des bureaux, ils sont là avec toi. De toute façon, il faut accepter parce qu’on a soi même signé le contrat. Là, le patron était un algérien. Aved les artisans, ça dépendait de celui avec qui tu tombais. Eux aussi, ils peuvent t’envoyer balader : une semaine et puis fin de contrat.
Moi à cette époque, je n’avais pas trop besoin d’argent. Quand je faisais les petits boulots, je vivais au foyer et je ne payais plus le loyer. Avec le minimum, j’arrivais à manger. Et si j’avais besoin de sous, je retravaillais un peu. Il faut dire que c’était encore facile de trouver du travail et qu’il n y avait pas encore trop de chômeurs.
Je ne restais quand même pas trop longtemps sans travailler, je ne peux pas. Il m’arrivait de couper les cheveux gratuitement pour les plus jeunes du quartier qui avaient 15, 16 ans. La plupart, j’avais travaillé avec les pères et je connaissais leurs enfants. Je fréquentais ces jeunes parce que j’avais été un bon joueur de football chez Talbot et avec eux, je pouvais faire des matchs. Quand j’avais une semaine ou 15 jours de temps libre je le passais avec eux. Ils se retrouvaient souvent dans in petit local qui faisait fonction de centre associatif de La Coudrai, un quartier de Poissy. Tous les jeunes s’y retrouvaient. la moitié allaient à l’école, les autres travaillaient. On faisait des fêtes entre nous et il arrivait qu’on fasse des fois des virés dans la forêt. Quand on campait, j’e m’occupait de la cuisine. Evidement, les gens du foyer, ce n’était pas la même ambiance. Alors j’avais plaisir à être avec eux.
Je continuais dans le même temps à passer dans mes deux boites d’intérim et à rester à leur disposition. Ils s’arrangeaient pour nous trouver à chaque fin de contrat, un autre qui suivait.
Les petits boulots se sont succédés, une semaine, « fin de contrat », 15 jours, « fin de contrat », et ainsi de suite…
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:23

L’ARRESTATION :
En octobre 1986, cinq inspecteurs de police se sont présentés chez moi. Ils ont tapé à la porte, je n’ai pas répondu parce que j’étais en train de dormir. Résultat, ils ont alors cassé la porte et ils sont rentrés, mandat de perquisition à la main, en se mettant à fouiller minutieusement partout. Ils ont trouvé un joint qu’ils m’ont montré en guise de preuve. Je fumais le shit couramment et je ne l’ai pas nié, tout en précisant également que je n’étais qu’un simple consommateur et que je n’avais fait quoi que ce soit avec la drogue et que je n’étais pas un trafiquant. Bien sûr, comme tous les fumeurs, ça pouvait m’arriver de donner de temps en temps un petit joint à un copain pour dépanner mais je n’ai jamais changer ça contre de l’argent. Ils ne voulaient pas me croire, et tout en remuant mes affaires dans tous les sens, un policier que mes réponses énervait m’a donner une gifle. Ma réaction a été immédiate. Je n’ai pu m’empêcher de lui rentrer dedans. Et autant dire que ça m’a valu un beau dossier. Les policiers m’ont emmener directement à Versailles chez un certain juge qui s’appelle Madre, le juge le plus dur du tribunal (il y est toujours).
C’était chaud comme arrestation parce que je n’étais pas seul dans l’affaire et qu’elle touchait du monde. Nous avons été dix à être en même temps arrêter et passé en jugement. C’était l’époque ou Pasqua inaugurait sa politique qui se voulait énergique et impitoyable. Pas de détail. Il y avait des étrangers qui étaient expulsés sans motif grave, uniquement parce qu’on les avait contrôlé et qu’ils n’avaient pas de papier.
Le juge Madre s’est donc bien amusé avec mon dossier, il m’a bien soigné. D’abord, il m’a collé 4 mois ½ en prison sous le régime du dépôt. Moi, je me disais : «ce n’est pas plus grave que ce que j’ai déjà passé en cellule. Après, ils vont me relâcher». C’est ce que je pensais. Parce que lorsque ces quatre mois ont été terminés, alors que je croyais à ma libération, M. Madre m’a fait convoquer dans son bureau.
Il m’a alors dit : «M. N’Dali, on va s’arranger...»
Je ne comprenais pas, je lui ai montré mon étonnement : «Comment, M. le juge, on va s’arranger ?»
Il a alors dévoilé son jeu : «Voilà… donnant, donnant : tu me donne les grossistes de Mantes la Jolie et je te libère»
Ce n’étais pas dans mes principes et de tout façon, je ne connaissais pas les grossistes de Mantes la Jolie. Je n’ai pas donné suite à sa proposition. Je ne savais rien, c’était la seule chose que je voulais déclarer.
Effectivement, c'est dans le réquisitoire, je fumais avec un copain portugais, on achetait du shit ensemble, chaque vendredi, on partait au marché de Val Fourré pour acheter tous les deux. Lui en prenais pour 500 francs et moi, le plus souvent, à peu prés pareil. Ce n’était pas toujours autant, il pouvait m’arriver de n’acheter que 100 francs.
C’est qu’il vendait derrière moi, et que moi, je ne le savais pas. Après tout c’était son affaire. Il s’est fait arrêter et emmener en prison. J’ai fini par être mêlé à l’affaire. C’est vrai, au départ, il n’a pas parlé de moi mais au bout de deux mois, le juge Madre l’a fait craquer. Il faut savoir qu’à ce moment là, une petite circulaire naviguait entre les procureurs et les juges recommandant de faire sortir de la prison ceux qui balançaient les dealers. Madre avait fait un maximum de pression sur le copain portugais tout en lui agitant cette promesse et celui ci, pour finir, avait lâché mon nom. Il a donc dit qu’il achetait chez moi même si ce n’était pas la vérité.
En tout cas, le résultat a été simple : il est sorti, je l’ai remplacé. Pourquoi changer de méthode ?
Le juge a voulu que je fasse pareil, balancer des noms de gars de Mantes la Jolie. Moi, je voulais rester en dehors de l’affaire. Je suis resté sur ma position, muet.
Trois fois, le juge Madre m’a convoqué en me rabâchant la même proposition. « Donne les grossistes de Mantes la Jolie et je te sors de là ». Je n’ai pas fait comme le copain portugais, je m’en suis tenu à la vérité, à savoir que j’achetais au marché. A chaque fois il s’est mis en colère ; et il pouvait tempêter, je suis resté ferme.
Autant dire que cela n’a pas arranger mon affaire et qu’à la fin, il ne m’a fait aucun cadeau, que cela soit au niveau du réquisitoire ou à celui du jugement. En effet, toute les chambres de justice n’ont a pas la même sévérité. Au lieu de me faire passer dans la 11ème chambre, réputée plus clémente, le juge Madre a fait son possible pour que Kader N’Dali se retrouve dans la 8ème chambre, la chambre « front national ».
Quant au réquisitoire, il faut bien le lire. Ce qu’il y a dedans c’est le maximum de ce qu’on pouvait y mettre. On y lit : « usage de stupéfiant », parce que j’en fume, « détention de stupéfiant », parce que pour faire un joint, il faut en avoir sur soi, et « acquisition de stupéfiant », parce que ce shit, il n’est pas tombé du ciel, il a fallu l’acheter.
Voilà l’acte d’accusation, les mots sont impressionnant mais si on réfléchit un petit peu, on constate que ce n’est rien. Pourtant cela m’est revenu à 2 ans de prison et une interdiction définitive du territoire.
Dans le jugement, il est mentionné que je suis condamné « sur le doute »…
Ils n’étaient pas sûr de ce qu’ils faisaient mais ils ont préférés faire pencher la balance contre moi alors que je figure dans toutes les catégories protégées!
Dans le réquisitoire, il n y aucune trace d’un quelconque trafic mais le soupçon pèse plus lourd que mon passé, mon père qui a défendu le drapeau français en 1939-45, et ma propre participation à l’économie française depuis 20 ans. J’étais depuis 20 ans dans ce pays. Au passage, j’avais eu une phalange et demi coupée par mon accident de travail en 1972. Eh, bien ! Ils n’ont pas eu honte, ils m’ont quand même condamné « sur le doute ».
Qu’est ce qu’il leur fallait comme preuve ?
Au moment de mon arrestation, j’étais au foyer où j’avais 40000 francs de dettes.
Est ce qu’une personne qui trafique doit autant d’argent de loyer ?
Non, Cette interdiction de territoire, je ne l’acceptais pas à l’époque et je ne la reconnais toujours pas. Je n’ai jamais trafiqué.

LA PRISON
Je suis rentré en prison en octobre à Bois d’Arcy. Le 10 octobre 1986, pour être plus précis. Je n’avais jamais fait de prison avant. C’était parti pour deux ans. Le premier jour, j’ai été convoqué par le gradé de division qui m’a demandé ce que je savais faire. L’affaire a été réglée immédiatement. «Est ce que vous avez un métier ? »
J’ai répondu que j’avais une formation de cuisinier. On m’a emmené directement dans la cuisine. Nous étions 18 prisonniers à nous charger de donner à manger à 1300, jusqu’à 1400 personnes. On ne peut pas vraiment dire que nous cuisinions des repas trois étoiles. Légumes secs, lentilles, haricots verts, boites de conserves, le régime était au contraire sévère. La plupart des plats étaient à base de conserves. Ils ne se fatiguaient pas, ils ne voulaient pas que les taulards se croient dans un palace (Il n'y avait pas de risque). Pour preuve, le chef de travaux qui était lui même cuisinier, s’il voyait une personne de l’équipe en train de faire un effort par rapport au menu, venait aussitôt lui dire de ne pas améliorer. Cela ne l’empêchait d’ailleurs pas de demander pour son propre compte des tuyaux à celui qui savait faire tel ou tel plat que lui ne connaissait pas. Sinon, nous étions une équipe très soudée. Il le fallait bien puisque, non seulement on travaillait ensemble, mais on dormait dans les mêmes cellules.
Dans la mienne, il n’y avait que des gens de la cuisine. Les jeunes devaient le respect aux vieux, et les nouveaux arrivants devaient adopter la même attitude par rapport aux anciens qui étaient là avant.
Tout était réglé par l’ancienneté et l’amitié.

Je suis devenu Taulard à cause d’un joint.
Nous, les taulards, nous avions nos propres règles qui nous aidaient à tenir ensemble. Ainsi cette équipe était une bonne équipe discrète, ou nous nous faisions un point d’honneur à ce qu’il n’y ait pas de balance entre nous. Je me souviens que lorsqu’un cuistot était libéré, on allait tout de suite vers son remplaçant pour lui passer la consigne : « Surtout tu ne balances pas. Si un gardien te pose une question, il n y a qu’une chose à répondre pour ne pas se faire piéger : « je ne sais pas, ce n’est pas moi » et s’en tenir là ».
J’ai fini par devenir un des responsables de la cuisine grâce à un chef de travaux qui s’appelait Renes et qui a fait de moi le mieux payé de l’atelier et aussi de la prison. Après il y avait Akechli et trois autres cuisiniers qui touchaient eux dans les 1400 francs.
Etant l’un des plus anciens de l’équipe, cela ne m’avait pas posé de problèmes par rapport aux autres qui me respectaient. J’ai cité Akechli, et lui, c’est particulier parce que c’était un copain à moi de Poissy. Un jour, je me souviens d’une autre surprise quand on s’est retrouvés face à face dans la cuisine où il venait d’arriver. C’est moi qui lui avais expliqué l’atelier en lui faisant un topo sur chacune des personnes de l’équipe.
Je l’ai présenté à tout le monde. Ensuite il m’avait expliqué les raisons de sa présence parmi nous et ce qui l’attendait, expulsion, interdiction définitive de territoire : la même peine que moi. On est resté ensemble. Akechli a effectuer sa peine en travaillant à la peluche et à la plonge. Ils ont tout de même bien gagné, ces crapules, avec moi, même si j’étais un des mieux payé avec 1800 francs. Parce que j’ai fait 29 mois en cuisine, 7 jours sur 7, et que ça vaut vraiment plus que ce que je touchais.
Il n’y a pas de liberté en prison et l’argent y prend une importance particulière. Si le prisonnier a de l’argent, il y vit comme un chef, mais s’il ne reçoit ni lettre ni soutien quelconque, la moindre chose lui sera inaccessible. Les prisonniers sont obligés de travailler en prison. La moitié des gens qui viennent là ne sont pas équipés pour y vivre, ils ne touchent ni aide ni mandat, ni rien... Il y a bien l’assistance qui passe, mais bon, elle donne deux timbres pour permettre d’écrire, et puis c’est tout. Il n’y a vraiment pas d’autre solution que de se rendre dans les ateliers si tu veux pouvoir tenir. Si celui qui n’a rien est en plus inoccupé, je ne vois pas comment il peut survivre. En plus, c’est important de mettre de l’argent de côté pour quand tu sors. Moi qui n’était pas le plus mal loti, j’ai pu un peu économiser, ce qui ne m’a pas été inutile.
Je connais tous les ateliers de Bois d’Arcy et je peux en parler. Chacun avait une activité différente et ne regroupait pas obligatoirement les mêmes gens.
Pour commencer parlons de l’atelier de cosmétiques. Celui là, comme son nom l’indique, était chargé de la production de parfums. Il avait un réputation particulière, non pas tant parce que c’était là qu’on touchait le plus d’argent, que parce qu’on n’y mettait systématiquement des gens tombés pour viol. La raison évidente de ce regroupement, c’est que quelqu’un tombé en prison pour une affaire de mœurs ne peut pas sortir en promenade. Tout le monde va chercher à s’en prendre à lui, le violeur est jeté de partout dans le milieu pénitencier. Ces gens là sont donc tellement mal-aimés que l’administration leur a réservé cet atelier des cosmétiques où ils savent qu’ils se tiendront tranquilles et qu’il n’y aura pas d’histoire.
Il y avait aussi l'atelier des boulons et des vices. C'est encore une autre histoire. Dans cet atelier, les prisonniers doivent travailler sans arrêt comme à l'usine. Il s'agite pour eux de remplir les petits paquets de 100 g. de boulons, de les peser dans la balance et de les emballer. C'est un travail ou tu as intérêt à être rapide car si le prisonnier a un bon rendement, il peut toucher jusqu'àn 1200 francs. C'est du travail à la pièce, et donc celui qui ne suit pas le rythme n'a rien. Je me rappel qu'il y'en avait qui n'étaient vraiment rapides et qui touchaient à peine 400 francs. En effet, la plupart des prisonniers qui étaient là ne forçaient pas et touchaient à peine 10% du SMIC. Par contre, il y'en avaient qui ne tenaient pas compte de l'ambiance générale et qui, en s'activant au maximum, arrivaient à atteindre 20 % du SMIC.
Toutes les maisons d'arrêt possèdent ce genre d'ateliers où le prisonnier doit travailler comme un esclave pour atteindre ce maximum de 1200 francs.
Moi, je vivais dans le petit cercle de 18 personnes détachées à la cuisine. Et même si on restait entre nous, la cellule et la cuisine, on arrivait a connaître les autres prisonniers. Je sais, en ce qui me concerne, qu'en préparant les repas pendant 27 mois, tout le monde a fini par me connaître.
On rencontrait également les autres prisonniers dans la coure, à l'infirmerie, au cours de promenades et dans le terrain de sport. A ce moment donné je me souviens que j'avais fait ami avec des corses pendant les promenades et que j'avais pris l'habitude de tourner avec eux. Je faisais ça avec eux une fois par jour, sept jours sur sept, une heure en semaine, deux heures le week end. Ceux qui ne travaillaient pas avaient droit à deux heurs par jour tout le temps. C'est là que j'ai fait connaissance avec le meurtrier de Gennevilliers. Un des corses que je fréquentais et qui était tombé pour braquage m'a un jour présenté une personne dont on parlait beaucoup dans la prison ; ce type avait débarqué un jour chez nous et on le remarquait parce que peu de gens lui adressaient la parole. Il faisait le vide autour de lui. Ce gars là en fait avait tué 4 personnes. Son dernier meurtre avait été celui d'une prostitué, pour son porte monnaie. Tout le monde le craignait et le respectait, personne ne l'aurait bousculé, la coure entière flippait a cause de lui. Moi, je me disais dans ma tête que je n'avais pas peur de lui et on avait fait connaissance. Il s'appelait Ahmed. On tournait, moi, lui et le corse. Et je me souviens d'une discussion qu'on avait eu un jour ou je lui avait demandé comment il allait. Il m'avait répondu : ça va je suis très tranquille, le brigadier est très gentil avec moi.
Je ne lui ai pas caché qu'a mon avis, il se trompait. " Mais non ils ne sont pas gentils avec toi ", je lui ai répondu. " D'abord tu as pris 28 ans, ils ne peuvent pas te donner plus, ils ne vont pas te provoquer. Ca c'est vrai, tu n'as pas à t'en faire, ils vont te laisser tranquille , mais ça n'est pas par bonté, c'est surtout parce qu'ils ont peur de toi". C'était un type vraiment seul. Il avait bien un frère qui s'était occupé de lui ; qui était d'ailleurs procureur et avait tout fait pour lui. Il avait proposé à la justice de le transférer au Maroc mais la justice n'a pas voulu. Ahmed me racontait que quand il buvait, il devenait une autre personne, qu'il voyait un autre monde et qu'il n'était plus le même. J'ai fait sa connaissance alors que je terminais ma peine.
J'ai parlé d'Ahmed mais à Bois d'Arcy, il n'y avait que des charlots. Tous les voyous des Yvelines. C'étaient pas, en principe, des peines passibles de pérpétuité, mais plutôt des petits délits. Certains étaient là parfois pour de simples ecrocries de chèques, comme le portugais qui travaillait avec moi en cuisine. C'était dur mais je n'étais pas perdu. J'étais rentré en prison à 37 ans et à cet âge là, tu connais un peu la vie, même si tu n'as jamais été condamné avant, tu n'es pas trop surpris et étonné par ce que tu entend. La prison ou tout le monde est là pour un délit, c'est aussi un monde de la méfiance où l'amitié n'a pas la même valeur qu'à l'extérieur.


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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:24

LA DOUBLE PEINE
J'ai quitté la prison en 1989. Normalement, quand quelqu'un sort de la prison, il savoure sa liberté mais moi, il me fallait affronter l'interdiction définitive du territoire, je n'en avais pas fini avec la justice française. J'étais bloqué. Je ne pouvais pas avancer.
Il faut bien comprendre que je ne voulais pas rentrer au Maroc comme ça, les mains vides. N'oublions pas que j'avais travailler comme un bourricot pendant 20 ans. Après tant d'absence, rentrer sans rien aurait été une véritable honte. Sans compter qu'à 40 ans, je ne me voyais pas recommencer à zéro, cottiser pour la sécurité sociale marocaine alors que je n y avais jamais travailler. Je voulais rester, mais tout m'en empéchait. Quand je suis sorti, je n'ai rien retrouvé de mes affaires. Ils étaient venus chez moi, ils avaient tout casser, ma chambre avait disparu, envolée la pièce où j'avais vécu mes premières 18 années d'immigration. Tout avait disparu, il n'y avait plus aucune trace de ma présence, et encore moins de mes affaires, rien de rien … !
Au début, cela a vraiment été très dur. J'ai vraiment trop souffert. Autant se mettre à ma place, je me retrouvais sans rien, sans domicile fixe, sans amis, plus de copain, plus de nièce, plus de sœur : dehors. J'allais à l'hôtel, je taillais les rues, j'avais peur de l'ombre. En effet j'étais toujours à la merci de la police. J'ai été interpellé trois fois, J'ai fait le tour des centres de rétention, j'étais à Bobigny, Mesnil Amelot, deux fois, Versailles et à Orly, et j'étais dans le centre de Choisy le Roi, la grande galère et cette même histoire où on me transférait d'un service à l'autre comme une balle de ping pong, sans considération. On m'attrapait et je me retrouvait au centre de rétention et ensuite on m'emmenait au consulat ou je n'avais pas de dossier, ou je n'étais pas reconnu. On me relâchait, alors je retournais dans la clandestinité. Expulsé par la France. Non reconnu par le Maroc. Justice nulle part.
Je me mettais à raser les murs et à tailler les rues jusqu'à la prochaine arrestation. J'ai bien cru que j'aurais droit à l'expulsion et aux charters qui se traînaient dans le temps mais ce qui m'a sauvé en me maintenant dans cette précarité sans fin, c'était que lors d'un incendie au consulat de Nanterre mon dossier avait disparu par la même occasion. C'est cet élément qui rend ma situation insoluble. Comme le gouvernement a autrefois signé un accord avec Paris prévoyant qu'un marocain qui n'a pas d'affaire judiciaire notifiée ne peut être expulsé, on ne peut pas comme ça me mettre dehors. A chaque fois qu'il m'ont emmené a la préfecture, le fonctionnaire qui allait chercher mon dossier est revenu les mains vides : " désolé, on ne connaît pas ce monsieur ". Du coup, ils m'ont emmené au consulat marocain sans les pièces nécessaires. C'était cela qui me sauvait parce que comme je n'avais pas le dossier officiel, les marocains regardaient mes états de service en France et voyait alors toutes mes années de travail ici, trop pour être expulsé, trop pour être expulsable facilement à leur avis. Il faut bien qu'ils se rendent humains quelquefois, et même si le consulat ne défend pas les cas de double peine, ils doivent trouver mon cas digne de considération. Ils n'ont jamais voulu aider à mon expulsion, ce que je trouve normal. Et cela c'est passé ainsi à quatre reprises.
Ainsi donc, je suis non reconnu au Maroc et expulsé par la France et non désirable, donc refoulé par les deux pays. Ce n'est pas la double peine, c'est la triple peine ! ! ! Ils peuvent m'attraper encore dans la rue, cela sera encore la même histoire, on m'emmènera au centre de rétention et une fois au stade du consulat, retour a la case départ, la clandestinité. Cela sera toujours pareil, la même situation bloquée. J'ai fait trois requêtes qui ont été trois fois rejetées. Les rois requêtes je savais pourquoi elles étaient rejetées : la huitième chambre de la cour d'appel de Versailles, ce sont des Front national, et quand ils ont vus que je militais au Comité National Contre la Double Peine, et que je suis leur cuistot, ils ont rejeté les recours, et pourtant je figure dans toutes les catégories protégées contre l'expulsion. Quand on regarde bien, j'ai un super dossier au vu de l'itinéraire de mon père dans l'armée française et du mien chez Talbot ou l'immigration protégée par les lois françaises. J'en arrive à me demander si mon cas rentre dans le cadre de la justice. J'ai quitté la prison en 1989, et ça traîne, ça traîne comme cela jusqu'à maintenant. Ce qui m'a aidé : la cuisine et ce diplôme obtenu dans l'armée marocaine. Avec ce métier dans les mains, on arrive toujours a trouver du travail au noir. Il faut toujours savoir mener, faire dans la discétion. Dans tous les cafés rebeus, ils ont besoin d'un " chiffon ", comme on dit ; c'est à dire un cuisinier qui travail au noir. J'ai également trouvé de l'embauche dans la boulangerie, j'ai travaillé un peu partout en fait, et je continue…

LA GRÊVE DE LA FAIM
A l'époque, je vivais donc sous la menace permanente de contrôles d'identité et j'en avait marre de trainer un peu partout en me cachant.
Allah est grand… Un jour un copain de Kenitra m'a raconté qu'il existait un Comité Contre la Double Peine qui faisait parler de lui. Peut être que je devais aller les voir. En effet, le comité contre la double peine venait de lancer une grève de la faim pour tous les étrangers expulsables. J'ai donc été voir qui étaient ces gens qui s'étaient regroupé sur un problème que j'affrontait pour l'instant seul . Malheureusement, quand je suis arrivé, la grève de la faim avait déjà commencée depuis 10 jours et il était trop tard pour moi qui voulait rejoindre le mouvement. Je voulais vraiment arrêter de manger mais ils m'ont tous dit que ce n'était plus possible. On a discuté, et je tenais à participer à cette lutte qui était la mienne. J'ai dit : "C'est grave, je vais rester avec vous". Ils m'ont bien reçu, pas de problème. Le milieu militant m'était alors inconnu, mais je n'ai pas tardé à le connaître. Maintenant, ces gens que j'ai découvert sont devenus mes amis que je fréquente depuis 10 ans. J'ai débarqué en pleine bataille, il fallait bouger un peu partout : distribuer les tracts, coller les autocollants dans les lignes de métro. Je faisais les courses pour les grévistes, je m'occupais du thé et du café, je participais au nettoyage, je les soutenais de mon mieux. Des fois les grévistes m'envoyaient chez leurs familles pour des courses, chercher telle et telle chose, ou des fois se rendre dans les préfectures pour aller chercher les " arrêtés d'expulsion ". Je me suis bien occupé d'eux. Finalement, on a obtenu une petite circulaire : la loi Sapin qui a fait un peu avancer les choses pour nous. Le soir ou on a eu cette petite victoire, on a fait une fête et c'est là que pour la première fois j'ai fait la cuisine pour le Comité contre la Double Peine - et celle là ne sera pas la dernière...
La loi Sapin, je tiens à le signaler, a aussi fait des heureux chez les avocats qui profitent de notre situation. Il faut savoir que lorsqu'un " double peine " se présente chez l'avocat, c'est une mine d'or pour lui. Il peut toujours demander à l'expulsé ce qu'il veut, ce dernier dira oui, pas de problème : "Si j'ai mes papiers, c'est à dire si j'ai une vraie vie, je vous donne tout ce que vous voulez, monsieur l'avocat".
Voilà ce qu'il se dit, un "double peine". Il n'a pas de vie. Sans papier, il devient un mort-vivant. Il ne peut pas travailler, il est jeté de partout, il a peur de tout, de prendre le métro, cela représente pour lui les contrôles et la police. Dans la rue, c'est à peine mieux, tu as peur, peur de toi même, de ton ombre. Le seul qui peut savoir ce que c'est que la double peine, c'est celui qui en est victime. Quand j'ai rencontré le comité contre la double peine, l'association existait à peine ou tout du moins, si elle était déjà née, elle était pour ainsi dire inconnue. Maintenant, dix ans après, on a réussi à graver son nom comme une référence. Pour mériter ce nom, on a bougé en France, en Europe, partout là ou on pouvait.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:25

LE COMITE CONTRE LA DOUBLE PEINE, j'y suis, j'y reste.
C'était ma lutte et je suis resté au comité après la grève de la faim, et j'y suis toujours.
Il s'est passé pas mal de choses. J'ai continué à faire de temps en temps la cuisine. C'est comme ça que les militants de la double peine m'ont surnommé : " le cuistot sans frontière " (Soufiane). Nous étions basés rue de Nanteuil, dans le XVème, un centre associatif et culturel ou le Comité contre la Double Peine jouait un rôle important. Il y avait beaucoup d'associations, mais certaines étaient confidentielles, et nous, bien qu'installés dans une cave, étions une de celles qui faisaient la réputation de la rue de Nanteuil. La plupart des gens qui venaient au centre, se déplaçaient pour nous ou les deux associations qui étaient ensemble dans le temps, Reflexes et SCALP, qui avaient comme objectif la lutte contre les fascistes. C'est là que j'ai commencé à être reconnu comme le cuisinier du milieu associatif. Il y avait une grande cuisine qui donnait sur une grande salle de restaurant, mais elle était abandonnée et était très jolie et ça me faisait mal au cœur qu'elle ne serve à rien. Seuls les uruguayens de l'association " la pariada " venaient y faire à manger le vendredi et c'était tout. J'ai fait une demande officielle à la direction du centre, le CICP (Centre International de Culture Populaire) pour cuisiner non seulement pour mes amis, mais aussi pour tout les militants en général qui étaient obligés de se nourrir de sandwichs ou d'aller dans des restaurants à l'extérieur.
Pendant un an, j'ai fait tourner la cuisine comme il faut, en assurant à tout le monde une bonne nourriture, sans boite de conserve, et avec peu de moyens. Je ne travaillais que quatre petites matinées, juste pour assurer le repas du midi, parce que les membres d'associations rentraient chez eux après leurs permanences une fois par semaine au moins. Je m'étais mis d'accord avec Reflexes, l'organisation anti-nazi, pour assurer le repas qui suivait leur réunion hebdomadaire. Cela faisait à nourrir entre 15 personnes les mauvais soirs, et trente, les bons. Ils organisaient aussi un concert par mois où ils me demandaient de venir. J'ai commencé à gagner un tout petit peu d'argent malgré les plats à la tête du client. L'association qui a de l'argent, je comptais pour eux 55 francs le menu, et l'association qui n'en a pas beaucoup, je comptait 50 % moins cher : 25 ou 30 francs. Avant j'avais beaucoup d'amis, mais le destin m'a poussé vers la prison et je me suis retrouvé seul, sans amis. Il y a des copains que j'ai nourri dans le temps et qui m'ont fermé la porte au nez quand j'ai cherché à les revoir, après Bois d'Arcy. Moi, j'en ai déduit que pour beaucoup l'amitié, c'est lié à l'argent, pas chez moi, mais pour la plupart des gens, malheureusement oui. L'amitié fidèle, en fait, c'est auprès de la femme et des enfants qu'on la trouve parce qu'on est lié. Les copains d'un jour, on en trouve facilement, mais les amis, il y en a peu, pas beaucoup de gens.
Je raconte cela parce que le Comité contre la Double Peine, ce sont maintenant des gens que je fréquente depuis dix ans. Et en dehors d'eux, je n'ai pas véritablement d'amis. Ceux d'avant ont disparu et eux, que je n'aurais jamais pensé rencontrer, les ont remplacé. On a vécu ensemble des bons moments comme des coups durs. Ces amis, ce sont des anciens résistants des banlieues qui se sont regroupés pour aller plus loin en formant le comité contre la Double Peine, puis plus tard le Mouvement de l'Immigration et des Banlieues (MIB), parmi eux, il y a des expulsés, comme moi avec qui je partage une expérience commune. Oui, là, j'ai trouvé des amis.
Les militants de Sah (vrais militants), des purs. Ils m'ont aidé moralement quand je les ai rencontré mais aussi à chaque fois qu'il le fallait. Quand j'étais interpellé et placé au centre de rétention, il faisaient leur possible pour m'en sortir : ils m'envoyaient des mandats, ils téléphonaient partout, ils ne me lâchaient pas. Je vais raconter une anecdote qui a son importance pour moi au vu de ce que l'Etat français me fait subir. En 1993, à la rue de Nanteuil, des journalistes du ministère de la culture se sont déplacés chez nous dans le 15ème, avec le directeur des Beaux Arts de Lyon. Ils m'ont filmé pour un film qui s'appelle le " Bâton de pèlerin ". On a tourné ce film au 15, rue de Nanteuil et on s'est déplacé vers la Tour Eiffel. Le directeur des Beaux Arts, il a vidé au moins 4 pellicules de photos sur moi, ensuite il ont exposé les photos au Centre de documentation de Beaubourg. 20 000 personnes peuvent voir mes photos à Beaubourg, et ceux qui m'y voient ne me reconnaîtraient pas dans la rue. Moi qui suis recherché, ma photo est dans le magazine "Beaux Arts" de février 94 à la page 100.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:29


LeCentre International de Cultures Populaires (CICP) a déménagé en juin 1994 pour se retrouver rue Voltaire. Il voulait passer à une étape supérieure dans son projet. On se retrouvait les mêmes associations mais l'ambiance n'est pas la même avec le changement de local. Après l'installation, il a fallu travailler au milieu des caisses et des cartons. Nous étions juste à coté de Reflex, les anti-nazis. De ce coté là, on avait pas à se plaindre puisqu'on s'entendait bien avec eux mais on était constamment dérangé par les travaux. Difficile de se concentrer sur les dossiers et de recevoir les gens dans ces conditions. Surtout le centre avait déménagé et cela coûtait beaucoup d'argent. Rue Voltaire, nous n'y sommes donc pas restés longtemps. Cela revenait vraiment trop cher pour nous et on a fini par avoir des dettes qu'on aurait eu du mal à honorer même avec de bons arrangements.
Peut-être est-ce un mal pour un bien ? On a laissé le lieu pour se retrouver au 46 rue de Montreuil où on a créé le Mouvement de l'Immigration et des Banlieues, le MIB. Il y avait en effet une autre raison à notre déménagement, l'endroit où on se trouvait était avant le siège du CAIF, Conseil des Associations immigrés en France, il ne représentait plus grand chose. Le comité contre la double peine pensait qu'il fallait voir plus loin au travers d'un mouvement et non plus d'un simple conseil. C'est pour cette raison que le MIB a été crée, et c'est également pour cette raison que ce lieu symbolique a été choisi pour l'abriter.
Les gens du MIB, mes amis, Il faut que je parle d'eux, je n'ai rencontré que des personnes remarquables, classés comme on dit dans la restauration, pour le haut de gamme. La plupart habite Paris et sa région. La moitié d'entre eux sont présents tous les jours et assurent la permanence. Comme je l'ai dit, ce sont des mecs biens, mais il y en a qui sont plus en avant que les autres et qui jouent un rôle plus important. Il y en a une dizaine qui, a mon avis, font marcher le mouvement et que j'ai envie de citer : Tarek, Farid, Amouda, Ibrahim, Lalou, Fatiha, Sardène, et tant d'autres qu'il ne faut pas oublier, Bouhalam et compagnie, Hafid et l'acteur Akim… Tous ont leur rôle et apportent un quelque chose à l'ensemble. Tark et Noordim, anciens militants de la résistance des banlieues, créateurs du comité de la double peine. Noordin, il peut mettre le feu à une salle. Tarek, c'est quelqu'un qui pourrait aller loin s'il voulait. Farid Talba, c'est le Tahar Ben Jelloul de la partie. Hamouda, lui joue le rôle de celui qu calme les esprits de tout le monde quand il sont trop échauffés. Lalou, il est gentil, il ne fait pas de bruit, et il travaille bien ; des fois il récupère même les papiers des gens en Préfecture, mucho gracias Lalou... Sardène, le navigateur, lui, fait à la fois son petit boulot à Lyon, et également beaucoup à Paris. Pierre Didier, on le voit pas mais c'est parce qu'il travail à Grenoble et à Lyon. Et puis Momo Hocine, un autre créateur du Comité. Quelqu'un qui ne lâchera jamais le mouvement et qui bouge partout. Surtout présent aux Mureaux. Ce n'est pas une salle qu'il peut enflammer, lui, c'est un village. Il faut parler également de l'autre Hocine, service d'ordre, bonjour les dégâts . Le souriant dans l'intimité est méchant, glaciale avec les policiers.
Il y a des femmes. Fatih, qui, je le sais ne lâchera pas non plus et Hafida qui la suit dans ce registre là. Toutes les deux s'entendent bien, ce qui est normal puisqu'elles sont corrects et partagent la même ligne du MIB. N'oublions pas Fatima, jeune fille sérieuse lorsqu'elle passe, s'occupe de beaucoup de choses. Il y avait aussi Hafid, le plus cool de la bande, aussi bien lui que ses idées de la vie. Je vais fermer avec Guy, le responsable de la radio Fréquence Paris Pluriel, normalement c'est lui le plus anciens de tout le monde, le pionnier. Il a beaucoup travaillé dans les prisons avant l'existence du Comité contre la Double Peine. Chapeau Guy, le civilisé!
Je veux dire par là que tous les jours ils aident les étrangers qui sont en difficulté, sans être payés. Des bénévoles. Moi, je ne connais aucune autre association qui se donne comme le MIB ou le Comité contre la Double Peine, je n'ai jamais vu ça. Dans le même temps, les avocats touchent l'argent et nous on fait leur travail. Ils ne nous aiment pas beaucoup, ils sont jaloux parce qu'on aide les étrangers sur le terrain qui est le leur en faisant des recours pour ainsi dire gratuitement. On ne demande que 250 francs, ce qui ne représente rien, même pas un dixième de ce que va demander un avocat, plutôt 5 % même. Il faut estimer qu'un expulsé qui se présentera chez lui devra sortir 5000 francs. Pas mal ! On sait que pour l'avocat pour qui c'est un métier, et qui ne prend pas les choses à cœur, le recourt se résume à un travail de rédaction de 10 minutes et à un ordre donné à sa secrétaire pour qu'elle tape le texte. Il faut également compter dix minutes pour la plaidoirie, tout ca donc pour 5000 et plus si ça marche bien. En effet, quand il y a des avancées dans l'affaire, et que le client par exemple obtient une assignation ou ses papiers, l'avocat ne le lâche pas, il va s'arranger pour que l'expulsé rajoute de l'argent, toujours plus. En effet, à chaque consultation à chaque fois que l'on voit ce monsieur, il faut ouvrir sa bourse. Ce n'est pas bon, surtout pour des gens qui sont dans le besoin et l'urgence. C'est pourquoi, nous, au comité, on est fier de taper les recours de façon à ce que tout le monde puisse s'en sortir. Notre travail fini par circuler dans l'immigration et qu'il n'y a pas assez de monde au centre pour accueillir tout le monde qui passe, beaucoup trop de monde pour encore trop peu de militants. Il n'y a que nous pour ça, même les mères d'enfants français quoi viennent nous voir, les expulsés aussi, on prendra le temps de bien s'occuper d'eux. Le Mouvement de l'Immigration et des Banlieues c'est donc les dossiers, les actions , les manifs, les coups durs. L'association se bat contre des tucs bizarres du système judiciaire, les non lieues et les suicides en prison. Une délégation du MIB a été invité au ministère de l'intérieur qui nous reprochait d'envoyer trop de dossiers et que jamais une association n'avait fait pareil jusqu'à maintenant… De temps en temps, on fait des fêtes ensemble. Il y'en eu un bon nombre, mais les meilleurs que j'ai vécu au MIB, se sont les mariages de militants. C'étaient toutes de grandes fêtes et j'étais présent à chaque fois (Tarik, Nordine, Soufiane et le mariage de la sœur de Momo). Dans un autre domaine, un excellent souvenir reste le match de football qui avait été organisé aux Mureaux : " Comité contre la Double Peine " contre l'équipe des Mureaux. C'était comique. Tout le monde riait mais le match était canon, très bien joué finalement : le score a été de 8 à 7 avec victoire pour les jeunes des Mureaux.

SURVIE
Parallèlement au comité, il a fallu gagné ma vie. Quand le centre de Nanteuil a déménagé rue Voltaire, j'ai pensé que le centre allait s'occuper de moi. Jusqu'à la construction du nouveau restaurant mais il a fallut que je cherche du travail. J'ai bossé un peu partout, à droite et à gauche et j'ai continué à galérer. Il y a eu deux restaurant à Asnières (place Voltaire) et un autre à Maurepas et un autre aux Muraux. J'ai continué à galérer et j'ai fait la caravane des quartiers. En gros je travaillais entre un an et six mois pour chaque job. Bien sûr j'étais embauché au noir. Comme travail à faire, ils faisaient tous de la cuisine française et rebeu. Des fois, en étudiant ces petits restaurants et en voyant ce qu'ils faisaient je me disait que je serais capable de monter ma propre affaire mais je savais qu'il fallait oublier cette idée. Pas la peine de me faire la moindre illusion à ce sujet. Quand tu n'as pas de papier, tu es obligé s'être un chiffon payé au noir et en plus, bien souvent, de travailler 16 h. par jour. Tout cela fait partie du monde de la restauration modeste qui ne marche pas beaucoup et qui triche dans tous les domaines, celui du personnel avec les conditions de travail et celui de la nourriture avec les boites de conserve. Ces patrons se plaignent tout le temps, et pourtant, ils gagnent bien leur vie, largement bien. Sur un menu, ils gagne 80% et quand ils accusent les taxes de les étrangler, ils me font rire, je les connais bien maintenant. Commençons par parler des Mureaux. C'est un hôtel où j'ai assuré les cuisine pendant 2 mois, pour les pensionnaires et les clients. Il s'appelle " l'hôtel de la gare ". Celui-là était bien, il n'y avait pas à se plaindre des conditions de travail et la paye était correcte. C'était Momo du MIB qui m'avait aiguiller là bas. Un jour, il a fait dans cet hôtel une fête parce qu'il venait d'obtenir sa carte d'identité et il m'a demandé de venir pour assurer la cuisine. Ce soir là, j'ai donc bénévolement aidé à préparer la fête de mon ami. Comme cela s'est bien passé et que Momo, un ancien des têtes de la double peine, était bien vu aux Muraux, le patron m'a embauché et je suis alors resté avec lui 6 mois. On me laissait tranquille en cuisine et je n'avais pas beaucoup de clients. Et ça se passait bien avec les pensionnaires. Ces derniers étaient des ouvriers qui venaient faire des travaux une semaine en ville, des gens de passage. Il y avait des retraités encore. L'endroit est très sympa. Le client paye 150 F par jour, chambre et raps compris, s'il restait au moins une semaine. Sinon ce qui n'allait pas dans l'hôtel et qui était chausd c'était qu'on y jouait aux cartes et que l'argent circulait. Quand il y a les cartes, le poker dans un restaurant, ça le casse, ça le descend, il perd de son prestige. Sinon l'ambiance était bonne. Ce patron ne trichait pas. Momo Hocine faisait venir beaucoup de clients. En effet, il ne m'avait pas fait embaucher par hasard. Il avait l'idée de devenir l'animateur gérant de l'hôtel et de changer la clientèle. Il n'y aura pas de jeu de poker, il n'y aura pas de jeu d'argent. Mais le patron n'a pas voulu. Momo a arrêté de venir et d'amener du monde. Le restaurant a commencé à couler. Deux mois après, je suis parti. Il n'y avait vraiment plus assez de travail, ce n'était plus intéressant. Le restaurant à Asnières a été une occasion qui s'est présentée à moi a une période ou je n'avais pas de sous. J'avais vraiment rien et il me fallait bien manger et payer ma chambre. Pour me dépanner, mon amis José qui voyait bien dans quelle galère j'étais et qui vendait des vêtements, m'en avait passé un stock pour les vendre avec un bénéfice pour moi.
Un jour, je suis tombé sur le patron d'un restaurant pendant ma tournée, on s'est mis a discuter et comme je lui disait que j'étais cuisinier, il m'a regardé avec mon tas de vêtement sur les bras, il s'est moqué de moi comme si je cherchais à me placer à n'importe quel prix : " Toi, cuisinier ? Ca m'étonnerait ! " Quand même, il avait besoin de quelqu'un et je l'avais intrigué. Il était prés à faire un essai : " Bon, la patronne n'est pas là, et ça ne va pas comme tu es. Tu vas te couper les cheveux et tu te présentera bien propre devant elle. "
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:30

[SIZE]Le lundi, mes cheveux n'étaient pas coupés mais ça ne m'a pas arréter et je me suis quand même présent pour voir la patronne. Ca n'a pas posé de problème, elle n'était toujours pas là. Lui m'a dit : "Bon d'accord, tu vas toujours montré ce que tu sais faire... Et tu commences aujourd'hui. "
Les trois premiers jours, il a continué à ricané, mais sans me mettre à la porte. Et à la fin de la semaine, son opinion avait changé. A ce moment là, la patronne que j'avais eu entre temps l'occasion de voir mais qui n'était jamais venu me parler, s'est présenté pour m'entretenir de ses projets. " Ici, je voudrais que ça change. Devant chez nous, il y a un restaurant qui se fait 60 couverts et moi, rien… Ça n'est pas possible, si eux y arrivent, nous on doit pouvoir faire mieux. " On est sorti et on s'est promené en discutant de ce qu'il était possible d'envisager pour changer la situation ; J'ai dit ce que moi, je pouvais faire de mon coté et le lui ai donné ma promesse que je pouvais garantir que 25 sur les 75 qui allaient en face préféreraient bientôt venir manger ici. Ca lui allait. Mais elle a demander combien je demandais : " 6000 Francs par mois, mais attention, je ne fais que le midi." On est tombé d'accord comme ça et je travaillais pour eux sept mois.
Les cinq premiers mois, ça s'est bien passé, elle était cool avec moi.
La patronne était une kabyle, je me souviens, on faisait cinq jours de cuisine française et deux jours de cuisine marocaine. J'ai réussi a augmenter la clientèle de quarante personnes. Il y avait des gens, des parisiens, quelques profs de la fac de Gennevilliers. En tout, quarante personnes, plus, d'après ce qu'ils disaient, 6 ou 7 le soir. J'ai fait venir les clients en faisant le pain moi même. Des voisines venaient même en chercher, ainsi que des tagines à emporter. Cela aurait pu durer longtemps si a partir du sixième mois, il ne s'était pas mis a oublier de me payer. J'étais obligé de les quitter, ils n'arrêtaient pas de me dire : "Fais moi crédit ; attend ; on va te payer plus tard". Ils m'ont ainsi arnaqué deux mois. Autant dire que les deux derniers mois, l'ambiance était devenu détestable puisqu'il n'y avait plus de confiance entre nous. Je suis parti et ils m'ont quand même arnaqué de deux mois. Ils ont coulé et ils ont vendus après. Ensuite il y a eu un autre restaurant à Asnière, suite à la réputation que je m'étais faite en augmentant la clientèle du restaurant du théâtre. En plus, le soir, je passais au comité de la double peine. Brahim et compagnie, tout le milieu jeune de Casablanca, passait me voir et faisait ma publicité. J'étais connu tout de suite.
Et quand j'ai quitté, un patron de restaurant qui avait entendu parler de moi est passé me voir : " j'attend un peu que ton histoire avec tes patrons se tassent et tu vas travailler avec moi ". On s'est entendu sur le salaire et j'ai commencé à travailler chez lui. Mais alors là, ce n'est pas une affaire. C'est dur, très dur. Ce type n'avait pas de client. Et pourtant , le restaurant possédait ce qu'on appelle une belle vue, en terme du métier, puisqu'il avait une station de taxi juste devant la porte. Au début, je ne faisait plus un couvert puis j'ai réussi à augmenter l'affaire, jusqu'à trente neuf couverts. Mais vraiment, c'était le bagne parce qu'il fallait que je fasse tout. En plus, à un moment donné, le patron a embauché quelqu'un de sa famille, normalement pour me donner un coup de main… mais c'était pour surveiller la barmaid au bar. Pendant ce temps, j'étais tout seul à me démener à la cuisine, à servir les clients, et à faire la vaisselle et à aller aux courses ! ! C'était trop, je suis parti. J'avais tenu que deux mois.
Je me souviens aussi d'un autre restaurant que j'ai gardé à part, qui nous fait revenir en arrière, en 1989. Quand je suis sorti de prison. Celui-ci s'appelait " Le Tassili ", à Maurepas, près de Trappe dans les Yvelines. Je me rappel que je m'étais présenté et que, pour avoir plus de chances de me faire embaucher, j'avais prétendu que je ne comprenais que la cuisine française. Il avait acquiescé, hoché la tête, et puis comme si je n'avais rien dit, m'a demandé si je n'avais jamais fait le couscous, le méchoui et le tagine. On à travaillé ensemble, c'était cool chez lui. On se tapait le " pétard " ensemble. Au début, il m'a pris à l'essai et je me rappel que c'était pas évident, parce qu'il était lui même ancien cuisinier et qu'il connaissait le métier. Il y avait aussi un garçon de service pour la salle, un libanais. On s'est tout de suite fait confiance. Après avoir jaugé ce que j'étais capable de faire, il m'a laissé entière initiative. C'était une bonne ambiance, les joints, la confiance, la rigolade, chez Tassili, je suis resté 6 mois. Et je suis parti de moi même, parce qu'à la fin je n'étais plus libre dans la cuisine. En effet, il ne se trouvait que le week-end, le vendredi et le samedi, j'avais trop de travail à assumer tout seul : entre 60 et 100 couverts par soir et qu'à ce moment là, le patron a fait venir une copine à lui pour me donner un coup de main.
Cela aurait pu être une bonne chose, mais le problème, c'est qu'on ne s'est pas entendu. Quand elle travaillait avec moi, elle prenait toute la place, elle me donnait les ordres. Elle me dérangeait trop… J'en ai parlé avec Kamel, le garçon de salle. Il comprenait ma position, lui non plus ne trouvait pas la situation saine. Je lui ai dit : " Mon cher ami, tu me vois là mais je vais partir. Je vais parler au patron régler ce problème vite fait." En effet, à trois ou quatre reprises, j'ai fait comprendre au patron, qu'il fallait qu'il prenne un décision. Mais il a fait comme s'il n'entendait rien. Il faut dire que la femme était jeune : trente ans, et lui cinquante cinq. Alors qu'il était trop pris, il ne pouvait pas me rendre service. Moi, un soir, j'ai arrêté. Ce jour là, il avait engagé un autre garçon de service et je me suis retrouvé à faire face seul à deux personnes qui venaient m'apporter les commandes. Là j'ai arrêter, dommage je m'entendais bien avec Kamel. Il partageait les pourboires avec moi, alors qu'il n'était pas obligé. Je lui avait demandé un jour pourquoi et sa réponse me l'avait fait considérer comme un ami. " Parce que toi tu te brûles tous les jours à la chaleur des fours ". Ce n'est pas tous les jours qu'on rencontre ce genre d'attitude.
Sinon, c'était le restaurant qui faisait le meilleur couscous de la région. Il est situé entre des tours HLM et les gens descendaient de chez eux pour venir chercher le couscous à emporter.
Les quatre restaurant dont je viens de parler se situent à des périodes différentes. Le dernier en 1989, les Muraux au moment ou je fais connaissance avec le Comité Contre la Double Peine.
Je les ai regroupé pour qu'on comprenne bien quel travail j'ai fait et que depuis ma libération de prison, la cuisine joue un rôle permanent.[/size]
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:30

En novembre - je ne savais pas que ça durerait - j'ai commencé à faire quelque chose que je n'avais jamais fait : vendre un journal de rue qui s'appelait alors le Lampadaire (depuis le nom est devenu l'Itinérant). Je ne me suis pas mis n'importe où, mais à Neuilly.
Cela fait maintenant quatre ans que je fais ce travail et, grâce à ce que je vends, j'arrive à gagner ma vie. Pas une fortune, un peu, mais suffisamment pour gagner ma vie. C'est un ami qui m'avait indiqué Neuilly en me cédant le travail et la place. Lui, il avait vendu un tout petit peu là bas, mais il n'a pas tenu le coup. Il ne voulait pas continuer. A ce moment là, j'étais en panne d'argent et je lui avais fait part de mes problèmes. Il m'avait alors proposé de le remplacer et d'aller vendre le journal là bas : " Neuilly, c'est connu, tout le monde le sait, m'a-t-il dit, il y a de l'argent, c'est rempli de gens riches, des gars de la télé ou du spectacle. Tu verras, ça vaut le coup. " Je n'avais pas vraiment le choix. J'avais besoin d'argent pour payer mon loyer. Mon ami m'a montré le siège du Lampadaire. A partir de là, c'est moi qui ai discuté avec le responsable pour obtenir le badge, c'est à dire pour pouvoir vendre.
En fait cela a été une première expérience qui a duré une semaine, juste le temps de gagner la somme dont j'avais besoin. Après, j'ai arrêté. Mais j'ai été obligé de reprendre parce que j'étais dans le pétrin comme rarement je l'avais été : sans argent, sans chambre, dormant même au MIB. J'ai donc repris et maintenant, quatre ans après, tout Neuilly a du acheter mon journal. C'est sûr, de temps en temps, quand je réfléchis à ce travail qui n'en est pas un, ça ne me réjouit pas de vendre un journal de rue. Je sais très bien ce que je pourrais faire si je n'avais pas cette double peine sur le dos. Ma situation est d'autant plus rageante que j'ai trois métiers(cuisinier, pâtissier, boulanger) ou il n'y a pas de chômage.
N'en parlons plus et prenons les choses du bon coté ! Vendeur de rue à Neuilly, si on est sérieux, on gagne de l'argent. C'est un endroit spécial, Neuilly. C'est un quartier très bourgeois. Tout un petit monde avec plein de nationalités Les gens peuvent être très gentils mais ils ont un défaut : la méfiance. Ils ne discutent jamais entre eux. C'est rare que je voie trois femmes qui parlent ensemble. Les bourgeois ne sont pas amis tout de suite, il leur faut le temps. Maintenant, je les connais mais au début, j'ai eu du mal à les comprendre.

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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:31

Parfois, Neuilly, c'est trop surprenant : ils sont bien habillés, très distingués, et puis, ils n'hésitent pas à se bousculer entre eux, sans ménagement. Tout ça finalement, c'est normal, l'argent entraîne l'égoïsme. Je les voix faire leurs courses, la plupart, ils ne calculent pas, ils achètent tout ce qui vient. Ce n'est pas un problème pour eux d'acheter des gâteaux chers, très cher. La moitié des habitants fréquentent l'église. Maintenant, je les connais tous rue des huissiers, mais au début, ils ne me voyaient pas. Il a fallu que systématiquement, je leur dise Bonjour ou que je leur adresse la parole, sinon, jamais ils n'auraient pu imaginer de calculer s'ils devaient me prendre un journal ou pas. Je suis arrivé à ce qu'ils me saluent, ce qui est normal : je croise tout Neuilly au moins une fois par mois devant le monoprix. Je suis rentré dans leur musique, je fait partie de leur univers. Je n'ai pas de patron derrière mon dos sinon moi-même, c'est à moi de calculer mes honoraires et mon effort en fonction de ce que je me fixe comme objectif et ce n'est pas le plus facile !
Je commence fort le lundi. Ce jour-là, je travaille toute la journée jusqu'à six heures du soir et le reste de la semaine, je me contente de faire le matin. Au final, j'arrive à mes faire 5000, 6000f par mois. Il faut également tenir compte dedans les coups de mains que je donne à droite et à gauche comme de distribuer les prospectus publicitaires de tel ou tel commerçant. Le week-end, je surveille deux à cinq voitures pour éviter à leurs propriétaires les contraventions. De temps en temps, j'aide des clientes à mettre leurs colis dans les coffres des voitures. Les gens qui sortent du monoprix me donnent souvent la pièce. Le lundi, je mange sur place mais les autres jours, j'attends d'être chez moi pour me faire un vrai repas. Dans une journée, pour tenir ma permanence debout, je bois beaucoup de cafés, beaucoup de trop. Je n'ai pas froid. L'hiver bien sûr, il ne fait pas chaud, il faut être couvert mais c'est un boulet d'être dehors, un travail comme celui de maçon que j'ai déjà pratiqué. Je connais les combines, on prend l'habitude. Tu as froid dès que tu te caches les mains, c'est la principale chose à savoir. Quand même, il y eu une période l'hiver dernier à Neuilly où j'ai souffert. Les gens ont été très sympa avec moi et pendant les fêtes, ils m'ont offerts toutes sortes de cadeaux du billet à la boite de chocolat, surtout les gens qui mes connaissent parce que je les aide. Je travaille en rendant service à la porte du monoprix alors on me rend ma gentillesse, normal…
Il y a des gens avec qui ça passe et d'autres non. Je me souviens en particulier d'une femme dans cette rue qui ne m'aimait pas. C'est simple quand elle me voyait, elle tournait le tête. Plusieurs fois, j'ai essayé de lui dire bonjour, elle ne me répondait pas. Un jour, elle a perdu la clef de sa voiture et je suis tombé dessus. N'étant pas sûr, je l'ai regardé puis essayé en laissant un mot " c'est moi qui ai la clef " que j'ai collé sur l'essuie-glace. Une heure après, elle est venue vers moi et je lui ai rendu sa clef. Maintenant, à chaque fois qu'elle me voit, elle me dit bonjour. Neuilly, c'est un endroit très connu, pour sa richesse mais aussi pour les gens qui y habitent. Il m'arrive de croiser des stars et de les reconnaître. J'ai ainsi croisée Sophie Favier. Elle sortait du monoprix, je lui ai donné un coup de main. Je l'ai revue plusieurs fois. Un jour, je lui ai donné l'itinérant, elle m'a tendu une pièce mais n'a pas voulu le prendre " je connais le journal ". Je l'ai considérée comme une femme très gentille qui donne aux pauvres. Elle est belle à la télévision mais sérieusement, elle est aussi belle balle dans la réalité.
Dans mes autres rencontres, il y a Michel Lebb avec qui j'ai discuté trois fois. Au début, il me frimait mais quand il a vu que je le connaissais, il est venu discuter et j'ai ainsi vu qu'il venait acheter un sandwich au monoprix. Les artistes n'ont pas une vie régulière. Il est venu manger pendant trois quatre mois et puis après, il n'est plus revenu. Je me souviens également avoir croisé Jeanne Mas, mais sans plus...
A Neuilly, je connais de vue tout le monde et au bout du compte, je discute avec un bon nombre de personnes et s'il se passe une histoire à Neuilly, je suis forcé de le connaître. C'est ainsi qu'on m'a dit que Jacques Martin que je voyais avant rentrer chez " Le Nôtre " avait une histoire amoureuse dans sa famille.
Le monoprix, depuis quatre ans, je connais non seulement la clientèle mais bien sûr également le personnel, qui lui vient tous les jours. On se dit un petit mot comme ça en passant tous les matins et j'échange des plaisanteries avec tous ceux qui le veulent bien. J'ai des bons rapports avec tous mais il y en a deux avec qui j'ai des relations de copain, c'est Fred et Linda. Les caissières me connaissent toutes mais Linda, c'est plus profond que les autres. Les autres employés, les ouvriers, l'étalage, les cadres, avec eux aussi, on se parle au gré de leurs allées et venues. Pareil pour les vigiles mais eux, ils bougent beaucoup, ils ne restent pas beaucoup longtemps au monoprix. Je n'en vois pas beaucoup qui sont encore en place depuis que je suis à la porte du magasin. A vrai dire, on n'a pas vraiment le temps de faire connaissance. Monsieur X, le directeur, ne leur fait pas vraiment de cadeaux. S'il voit un vigile qui fume derrière la porte, licencié aussitôt. Si ce même vigile n'attrape et ne repère aucun voleur, même châtiment. Pourtant à Neuilly, il n'y a pas beaucoup de vols dans ce magasin mais monsieur le directeur veut du rendement. En trois mois, j'ai du voir quatre vigiles à l'essai, ça défile. Tout ça pour dire que si j'ai de bons rapports avec tout le monde, ce n'est pas le cas avec monsieur X. Ce monsieur, un jour, s'est aperçu que j'avais la cote avec les clients et sil s'est mis alors en tête de m'éloigner de la porte, de me " dégager " comme on dit. C'est quelqu'un, il faut dire, qui n'a pas bonne réputation à Neuilly, il n'est pas aimable. Je ne dirais pas que c'est un raciste, il est lui même étranger. Non, pour moi, c'est un égoïste, un individualiste qui ne pense qu'à ses affaires. En tous cas, Monsieur X. m'a menacé verbalement. Il m'avait même fixé un ultimatum mais j'ai bien défendu mon bout de trottoir. Ce jour-là, deux responsables d'associations militantes sont resté à mes côtés et les clients m'ont montré leur sympathie en venant discuter avec moi.
Il voulait me faire partir mais il n'a finalement rien fait. Il avait décidé qu'il ne devait plus y avoir personne devant le monoprix mais je suis toujours là. Une personne m'avait confié qu'elle avait appelé la mairie. Je ne sais pas si c'est vrai mais c'est sûr que sa clientèle n'était pas d'accord. Ce que je fais, la façon dont j'aide tout le monde, c'est vraiment comme si je faisait partie du monoprix.
Depuis le temps, je commence à bien connaître ce quartier de Neuilly : la rue des Huissiers et les autres boutiques. Au début, j'ai travaillé un tout petit peu devant Le Nôtre, qui se trouve en face du Monoprix. Le copain qui m'avait indiqué le travail " était encore là et quand il vendait, il tenait la place " et moi, je devais alors me remettre devant Le Nôtre. Finalement, le Monoprix m'est revenu mais je ne sais pas si j'ai gagné au changement parce que je dois dire que je faisais d'excellentes recettes devant ce magasin peut-être meilleure que là où je suis actuellement. Il est difficile de parler de Neuilly sans mentionner " Le Nôtre " qui est magasin réputé dans toute la France, pour ses pâtisseries. Avant, ce magasin marchait bien et n'avait pas d'équivalence mais maintenant, ce n'est plus comme avant. Le Nôtre fait toujours recette pendant les fêtes mais après pendant l'année, il tourne plutôt moyen, plus comme autrefois. C'est très cher et si à Neuilly les gens ont de l'argent, ils en arrivent quand même en avoir assez surtout qu'il existe actuellement d'autres traiteurs comme CHAVY qui font aussi des belles choses mais qui eux sont plus abordables. Je relativise ce que je viens dire parce que Le Nôtre a bien travaillé pour la coupe du monde en particulier pour la finale où le magasin a assuré trente cinq mille repas. Finalement, Le Nôtre, c'est son image du bon goût une grande compagnie avec une usine basée à Plaisir Grignon où tout est fait en gros. On y prépare les repas qui seront distribués ensuite aux boutiques. Tout est mis dans des éléments réfrigérés mais ça peut y rester une semaine et ce n'est pas bon, ça ne correspond pas à ce que Le Nôtre prétend être. Est-ce qu'on sait en plus avec quoi ils travaillent. Je dis tout cela mais sa réputation reste immense. Il y a aussi la parfumerie mais c'est une autre histoire. Ce n'est pas une boutique cotée comme Le Nôtre mais quand on y rentre, ça sent bon, c'est une petite parfumerie bien décorée, cool, bien sapée, avec les meilleures marques, Chanel et tout ce qui suit derrière. Là aussi, je connais tout le monde et ils me donnent des échantillons, en particulier la patronne. Il faut dire qu'on a une sorte de contrat tacite : je leur fais la cuisine de temps en temps quand ils en ont envie et en échange, ils me donnent de leurs produits. On s'entend bien et leurs parfums sont bons.
Parmi la dizaine de commerçants de la rue, il y en a un sur qui je ne peux vraiment pas dire du bien et qui pour moi est un véritable raciste. Il me fait penser à un gros cochon qui n'a rien dans la tête. Rien qu'à voir son visage, je fais la comparaison, il y a des gens qui vous font penser à ce genre de pensées. Pour décrire vraiment le personnage, une fois, il a été chercher un policier municipal parce qu'il s'était aperçu que je sauvais les amis des griffes des contractuels en mettant de la monnaie dans les paramètres quand je les voyaient arriver. Lui, il regarde tout ce que je fais par derrière et dès qu'il a pu, il m'a mis sur le dos la police. Oui, un gros cochon, c'est bien cela ! Parlons d'autre chose.
Je fréquente également le café à côté du monoprix, la " brasserie des arts ". Le patron est gentil et c'est un endroit où je rentre souvent pour me reposer ou pour simplement le plaisir de dire bonjour. Je dois boire aussi cinq, six cafés par jour là-bas sauf à l'heure du " coup de feu " à l'heure du repas de midi parce que c'est l'heure où l'établissement reçoit a peu près cent cinquante clients. Il faut dire que l'agence Havas est en face de chez eux. La " brasserie des arts " est en fait un restaurant réputé tenue par un ancien chef de parti également ancien patron de deux autres restaurant avant (un ancien chef de part représente le rang au dessus de cuisinier). Pour moi, c'est de la grande cuisine, une " cuisine sans frontière " et le l'ai dit au patron plusieurs fois mais s'il accepte le compliment, préfère dire " cuisine internationale ". Des fois, je rentre dans la cuisine et je vois que ce que fait le cuisinier, Luigi, est vraiment bon et qu'il ne trafique pas. Parfois, les chefs de rang trouvent même le temps de faire eux-mêmes la pâtisserie. Le barman fait son travail " sur un pied " comme on dit dans le métier. C'est un endroit que je fréquente avec plaisir et j'aime bien perdre un peu de temps à discuter en ami avec Luigi de cuisine. La brasseries des arts est mon café habituel mais je vais également dans deux autres cafés qui font le coin de la rue. Mes journées sont aussi coupées ainsi entrecoupées de pots avec une bonne partie de Neuilly, les caissières du Monoprix, Linda, Zora, Marguerite, d'autres employés du magasin mais aussi de la parfumerie, certains clients avec qui j'ai fait connaissance en discutant. Quand je n'ai pas travaillé, beaucoup de gens me demandent où j'étais passé. On comprend pourquoi je reste là-bas et pourquoi je me suis battu pour ne pas être chassé du Monoprix.

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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:32

En plus, on est venu tourné un film sur moi, " Kader écrit ses papiers ", un court métrage. La plupart des employés et des clients m'ont vu être filmé et interviewé, je ne suis pas n'importe quel vendeur de rue.


La caravane de quartier

J'ai fait deux caravanes en même temps que Moghnis d'Immédiat. Une à Villeurbanne, et l'autre à Colmar.
La caravane de quartier, c'est une association qui organise des spectacles pour animer les banlieues un partout en France. Le principe est le même que les cirques, sauf qu'ici, la musique joue le rôle principal. Il y a 120 artistes au total, sans compter les techniciens et les militants qui dirigent la caravane. C'est très intéressant pour les villes Parce que cela leur donne une image

sociale et culturel pour les jeunes, c'est une fête parce que les artistes viennent chez eux.
Comme je suis connu comme cuisinier du monde associatif, ils m'ont appelé pour plusieurs tournées en France. En principe, la caravane a quelqu'un pour assurer les repas, un ancien cuisinier. Et moi, on m'appelait quand il était absent. On ne travaillait jamais ensemble. Parce qu'on avait pas la même façon de faire la cuisine ni la même organisation. Je ne nous voyait pas faire équipe ensemble.J'ai été contacté pour le spectacle qui devait se tenir à Villeurbane. Quand je suis arrivé là bas, ils m'ont fourni cinq jeunes filles bénévoles avec qui j'ai formé une équipe. C'était ma première caravane et j'étais content. Ce genre de responsabilités me plaisait. Comme j'étais
responsable de la cuisine, je devais me lever de bonne heure pour tout préparer et il fallait aussi se coucher tard pour tout remettre en ordre. Mais enfin, le travail lui même me plaisait. On devait fournir à manger pour 200 personnes le midi et autant le soir. Le premier jour on m'avait pas démarrer assez fort, on était parti avec 75 personnes à servir mais le lendemain on était passé à 145 couverts, pour finir à une moyenne de 200 personnes. La tournée de Villeurbanne à durer une semaine. Le dernier soir, avec les cinq copines, j'ai assuré un couscous pour 450 personnes. Quand le ventre est plein, la tête chante. La cuisine complétait le spectacle. J'en garde un excellent souvenir, l'ambiance était bonne. Ma deuxième expérience a été celle de Colmar et elle a été moins heureuse. Les gens de la caravane sont très malins. Ils savaient qu'il allait y avoir beaucoup de monde et que j'étais le plus qualifié pour les grands repas, alors ils m'ont emmené à Colmar.



Mouvement de l'immigration :(suite)

J'ai arrêté d'aller toujours au MIB mais je continue à faire les repas pour les concerts qu'organise régulièrement le mouvement, ou pour les grands événements. J'ai assuré ainsi trois concerts et celui en soutien à Munia Abu Jamal, condamné à mort aux Etats-Unis. Je me souviens que j'avais fait la cuisine rue de Montreuil et qu'il fallait préparer pour deux cent personnes, musiciens et sécurité. Je n'avais pas voulu assister au concert ce soir-là parce que j'étais trop fatigué. Les deux autres concerts ont été ceux de la campagne " justice en banlieue" organisé par le MIB. Ils se déroulaient à la Cigale en 1997. A chaque fois, j'ai eu à accomplir le même travail que pour le premier des spectacles : toujours à peu près deux cent personnes. On ne peut pas vraiment dire que j'ai le temps de voir les concerts et d'écouter les musiciens. Par contre, je les regardai manger ! Assassin, Momo, Roots, tous viennent en groupes. Le technicien, la sécurité, tous viennent en groupe se restaurer à tour de rôle dans la cuisine. " Quand le ventre est plain, la tête chante " comme j'aime à dire : je joue mon rôle dans ces événements.
Il a du quand même arriver que de temps en temps je descende voir le concert mais juste deux ou trois minutes, pas plus. Ce n'est pas grave comme ce n'est pas grave non plus de travailler ainsi gratuitement. C'est normal, je suis au MIB et quand il y des concerts du MIB, je dois participer.
En 1998, il y en a encore eu d'autres.
Toujours " justice en banlieue " et là, je crois bien que j'ai du atteindre 250 personnes.


La Shorba, la Maison des Ensembles.

Dans ma vie actuelle, il y a Neuilly, le MIB mais il ne faut pas oublier la soupe que je prépare toutes les semaines pour les sans-abri avec la Shorba pour tous, une association de la Maison des Ensembles, un centre associatif dont je parlerai ensuite. Le but de l'association " Shorba pour tous " est donc de venir en aide aux gens de la rue en distribuant à manger dans deux gares. Elle assure la cuisine pendant les sept mois ou il fait froid, automne et hiver, tous les samedis et dimanches. Je fais la soupe , tous les samedis et dimanche. J'en prépare mille environ, le 26ème jour du ramadan, l'année dernière, j'ai battu le record de la cuisine en assurant 900 couscous : 400 pour la gare d'Austerlitz, 400 pour l'autre gare et cent pour la maison des ensembles. Aussi loin que je me souvienne, c'est mon record en tant que bénévole.


Quand je travaille à la Shorba, je ne veux personne pour m'aider. J'aime bien travailler dans le calme et je m'arrange toujours pour commencer de bonne heure le samedi et le dimanche quand il n'y a encore personne. Ainsi, c'est prêt le soir, pour la distribution, ils trouvent la soupe prête. Moi, je n'ai pas besoin de bénévoles pour m'aider. Même s'ils sont de bonne volonté, ils ne connaissent pas le métier et des fois on se marche dessus. Je trouve qu'il y en a trop pour faire la distribution et que parfois il y en a qui ne font rien, qui gênent les autres. Par contre pour la cuisine, les volontaires ne se bousculent pas. Il y a bien parfois Magdah pour faire à manger de temps en temps mais c'est à peu près tout. Je n'aime pas en général avoir des gens qui tournent autour de moi à donner des conseils ou à demander à manger.
La Shorba pour tous tient une place à part dans la maison des ensembles. Ce qui s'y fait là bas est tout à fait différent des autre associations qui se placent sur le terrain des luttes sociales. C'est autre chose que d'aller vers les gens dans la rue et de leur donner à manger chaud. Sans oublier non plus la distribution des colis qui à lieu le jeudi. Je trouverais bien que cette association obtienne une subvantion pour ce qu'ils font. Ils méritent d'être aidés pour pouvoir continuer et ce n'est malheureusement pas assez le cas.
Je suis bien avec eux jusqu'à maintenant. J'avais fait une pause à un moment, mais j'y suis retourné comme je le leur avait promis. La Chorba, c'est un travail bénévol, qui mérite d'être fait même sur mes week-ends. Au début je commençais à aider la chorba sans trop chercher à connaitre la maison des ensembles.Je ne faisais que croiser les gens de l'associations qui travaillaient là bas. Et eux de leur coté, pour la plupart ne savaient pas que j'étais au MIB. On a fini par se connaitre. D'ailleurs, j'ai fait trois fois un repas pour la maison des ensembles : 2 couscous et une salade de riz qui a servi à un banquet de rue contre Mc Donald.

Bien sûr, comme je suis militant associatif, je savais comment la maison des ensembles avait été ouverte et par qui. A la base, il y avait des gens de Droit Devant, et aussi Agir contre le Chômage. Le comité des sans logis, Sud, la chorba, et deux personnes du mouvement de l'immigration : Guy Dardel et Hakim le barbu. Ils ont participés au début pour les aider à casser les portes pour rentre. C'est une grande belle maison qui a réuni au début une cinquantaine d'associations. Quand la maison a été cassée par queques uns d'associations les plus solides : Droits Devants, AC, et Sans Logis, compris avec eux les trois militants du MIB. Les jours qui suivaient, 50 associations sont venus installerleurs bureaux.
La maison des ensembles réunit donc beaucoup de monde avec une base qui la fait marcher. les graosses associations que j'ai déja cités. C'est un endroit super cool et j'en parle en toute connaissance de cause.
La maison des ensembles est également un endroit important pour ce quartier. C'est une présence qui met de l'ambiance dans ce coin de Paris. Quand il y a une fête, beaucoup de gens passent faire un tour, et même ceux quoi ne viennent pas savent que c'est un lieu important. Tous les marchands du marché d'Aligre qui se trouvent devant elle, sont contents, parce que beaucoup de gens y vont et parmi eux, beaucoup de clients. Ils savent que la maison des ensembles fait venir beaucoup de clients par son animation et que dans le même temps, c'est une maison qui défend au maximum l'immigration. La maison des ensembles qui pourrait encore être plus importante s'i elle était plus soudée, marche bien dans l'ensemble. Moi, je trouve tout a fait bien qu'à la place de la CGT ou de la CFDT qui occupaient ce lieux avant, il y ait maintenant des associations comme AC!, Droit Devant et la Chorba qui font un travail immense. Tous ces militants sont des gens de cœur, et quand il y'en a parmi eux qui trichent, ils ne vont pas loin.


18 mai 2000,

Journée historique du 46, rue de Montreuil, chez LAMI, La Maison de l'Immigration.
Après mon boulot de Neuilly, je rentre au MIB pour militer, et si on rentre tard, je dors là bas.
Le 18 mai 2000 à 6 h du matin, la police est venue récupérer le local. Le commissaire, les CRS, les képi, les RG, inspecteurs de police, quatre flics vêtus autrement avec blouson de cuir et pantalon bleu, 150 flics à peu prés pour casser la maison de l'immigration. Je dormais là bas, ils m'ont réveillé, j'ai compris. Ils m'ont laissé boire mon café, ce commando était bien organisé. Des équipes, la 1ère avec casques, ils sont monté sur le toit, chacun un appareil jaune à la main pour détecter l'armement. Une équipe qui fouille dans toutes les affaires, une autre qui emballe dans les cartons, cinq personnes qui blindent les portes et les fenêtres. Ils m'ont interdit de communiquer. Vers 8 h, ils m'ont éloigné à Voltaire dans le commissariat du XIIème arrondissement et ils m'ont relâché vers 9h30.
J'ai téléphoné à quelques uns, mais la plupart étaient déjà au courant. Il y avait un voyage à Bordeaux ou Tarek et Momo devaient partir défendre les anciens combattants. Ils ont annulé le voyage. Ils ne nous ont laissé aucune chance pour pénétrer dans le local. Ils ont bloqué les piétons des 2 cotés de la rue de Montreuil. Je ne suis rester qu'une heure et demi avec eux à l'intérieur et tout ce que j'ai témoigné, c'est tout ce que j'ai vu en une heure et demi.
C'est dingue, à chaque fois, Momo répétait qu'il y avait un micro quelque part et que les RG nous écoutaient. Hé bien, vraiment, c'est la vérité, il y avait un micro au plafond !
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:34

Aout 2000

J'avais deux propositions pour passer les vacances. Premièrement, Kamel de Montpelier m'a invité pour visiter Mimi la sardine. Deuxièmement, Fouzia (militante de Noisy le Sec) elle a trouvé une place de directrice de colo à La Baule. Elle m'a invité pour passer les vacances et l'aider en même temps pour la cuisine. J'ai bien réfléchi et j'ai pris un billet pour la Baule. En arrivant, elle m'a présenté la ville, jolie, bourgeoise, belle plage de 7 km de long. Ensuite elle m'a présenté les moniteurs : Rahima, kamel, et Mickaël. Trois jours après, Nicolas nous a rejoint. On était 6 à s'occuper des onze garçons et filles agés de huit à quatorze ans, handicapés mentalement. Nous avions en même temps les vacances et trop de travail. Les mômes ont fait deux concerts avec nous, un mexicain et l'autre à La Baule, avec les feux d'artifice. Ils ont changés avec nous. Tout c'est passé dans l'ordre jusqu'au dernier jour, malgré le petit budget de la Mairie, la directrice et toute l'équipe ont fait un grand effort pour gâter les enfants.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:35

Le livre, le film, la médaille de l'intégration
Préparation de " la hagra 2 "

Il y aurait encore plein de choses à raconter, mais je vais arréter là.
Avant de conclure ce livre de témoignage, il faut que je parle du film que j'ai tourné avec Olivier Poussett: "Kader écrit ses papier."
Tout en vous invitant à vous procurer cette cassette qui représente un autre regard sur ma vie, je vais vous raconter l'histoire de cette rencontre avec cet ami réalisateur. Une cinéaste, Yamina Benguigui voulait réaliser un film qui aurait pour titre "Mémoire d'immigrés". Elle a lancé des journalistes sur la piste d'histoires vécus qui pourraient nourrir son film.
Parmi eux, se trouvait Olivier Pousset qui m'a rencontrer au MIB et qui a été intéressé par tout ce que je lui ai raconté de ma vie. Yamina Benguigui a refusé l'histoire de Double-Peine dans son film. Olivier m'a fait part de cette décision mais on est resté amis. Il a fini par bien connaître mon existence et lorsqu'un an après, il avait besoin d'un sujet pour un documentaire qu'il devait réaliser, c'est tout naturellement qu'il s'est tourné vers moi. Cela s'est passé dans le cadre des ateliers Varans, école de documentaires qui tous les trimestre engage des stagiaires qui doivent réaliser des courts-métrages, ensuite classés dans la journée se clôture par un jury de spécialistes. En février 1997, Olivier est donc revenu me voir : " Voilà Kader, ton histoire, on a un mois pour la filmer. Est ce que cela t'intéresse ? "
J'ai donné mon accord. Il m'a ensuite expliqué comment cela allait se passer. Pendant un mois, il m'a suivi partout où j'allais. C'était sympa et on s'est plutôt bien amusé. Olivier n'était pas un débutant. Il avait déjà réalisé un petit film sur le Maroc qui s'appelle kif-kif, donc il avait de l'expérience, il tourne.
Avec ce que je lui avais raconté, il a monté une belle histoire. Il m'a donc accmpagné à Neuilly, au Movement de l'immigration et il est venu dans la cuisine du concer du MIB, à la cigale, en mars 1997. Il m'a filmé chez moi, il a réussi à bien me mettre en valeur comme personnage de documentaire. Mais je trouve que le film est trop court, et qu'il laisse sur sa faim, un peu comme un sandwich mangé sur le pouce. Enfin il n'y a pas de doute c'est un bon documentaire et ce petit reportage pour lequel on a travaillé tout un mois pour obtenir vingt minutes m'a permis de gagner la médaille de l'intégration. Ce n'est pas le moindre de ses mérites.
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:36

JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Medail10

Médaille de l'intégration décernée
à Kader par Koffi Yamgnane,
ancien ministre de l'intégration
lors du train forum, gare St Lazare
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MessageSujet: Re: JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA   JE ME PRESENTE ABDELKADER N'DALI NE EN 1949 A KENITRA Icon_minitimeVen 9 Jan 2009 - 6:38

La médaille de l'intégration, c'est une idée de Koffi Yamgnane, ancien ministre de l'intégration, justement, et député du ministère. Il s'agit en fait d'un train / forum qui circule dans toute la France en organisant des débats et des projections de film sur l'immigration, et à la cloture gare St Lazare, Koffi Yamgname dévoile le résultat des votes des différentes villes pour élire le meilleur film et attribue des médailles de l'intégration. Le film d'Olivier Pousset n'a pas gagné mais "Kader écrit ses papiers" m'a valu cette médaille, ô combien symbolique, de l'intégration. Quand je l'ai reçue, j'ai dit quelques mots qui m'ont valu les aplaudissements du public. QU'EST CE QUE REPRESENTE UNE MEDAILLE DE L'INTEGRATION, POUR MOI ? EST CE QUE CE N'EST PAS UNE CARTE D'IDENTITE POUR QUELQU'UN COMME MOI, QUI N'A PAS DE PAPIER, CONFISQUES POUR UN JOINT?!
A la fin de la cérémonie, j'ai un peu discuté avec Koffi, qui m'a dit de ne pas hésiter à m'adresser à lui. Il m'a expliqué comment le film avait été sélectionné par des spécialistes qui avaient trouvé l'histoire intéressante. J'ai d'autant plus apprécié ce qu'il venait de dire que, dans ce concours, je m'était retrouvé en concurrence avec Yamina Benguigui pour " Mémoires d'immigrés " par l'agence Immediat et deux autres films. Yamina n'est pas venue au concours, elle s'est contenté de délégué une de ses assistantes, mais cela ne m'a pas empécher en recevant la médaille de repenser à son refus de prendre mon histoire parce qu'elle cherchait les bons immigrés et qu'ellle me considére en tant que double-peine comme mauvais immigré. Cela ne m'a pas empécher d'être reconnu. Le film d'Olivier Pousset, il est bon et s'il a une valeur c'est aussi que ce n'est pas qu'un film, c'est aussi mon histoire et que ce n'est pas n'importe quelle vie…


Conclusion

Voilà, maintenant vous avez entre les mains une bonne partie de ma vie. Tout n'y est pas, mais vous avez le principal, une existence remplie et vous pouvez en juger par vous mêmes.
Ce pays porte mon empreinte, j'y ai eu mes traces, c'est un sentiment que j'éprouve au plus profond de moi même. Et cela devrait sembler naturel à tout le monde, après ce que j'ai vécu ici. Moi, je n'lâche pas. Je resterais, il n'y a pas à revenir la dessus. Soyez en sûrs, qu'ils le veuillent ou non.
Et je suis lié à ce pays. Mon père en est la plus grande preuve, lui dont il convient d'honorer la mémoire et non pas de l'effacer comme la justice le fait quand elle s'adresse à son fils. Je rappelle que mon père, tirailleur marocain a passé 20 ans dans l'armée française, et qu'on était bien content de le trouver en 39-45 quand la France était ennemie avec les allemands, au contraire de la situtaion actuelle où tout s'est inversé, et où c'est nous qui nous retrouvons au banc des accusés. Nous, les enfants des tirailleurs, les Nord-Africains, les amis d'hier. Je suis né sous le protectorat français, en 1949, sous le régime du Maréchal Liautey. Est-ce que l'Etat Français a également perdu la mémoire de ce qu'elle a pu faire autrefois ? !
Je le répète, mes traces, elles sont là. Je reste ici, c'est mon pays. Et il faudra, si on veut que je parte, qu'on me rende mon doigt coupé à la chaîne et mes années de cotisations.



Kader N'Dali,

assisté de Jean-Pierre Petit
et Nicolas Berthod.
http://nicoberto.free.fr/kader/Kader.html
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